Si les milieux d'affaires ont accueilli plutôt positivement la mise à jour économique du gouvernement Couillard, bien qu'ils aient soulevé certaines réserves, les syndicats, eux, ont tiré à boulets rouges sur les nouvelles mesures annoncées mardi par le ministre des Finances Carlos Leitao.

La Chambre de commerce du Montréal métropolitain (CCMM) et la Fédération des chambres de commerce du Québec (FCCQ) ont tous deux relevé l'inclusion des distributeurs d'hydrocarbures aux règles de la Bourse de carbone, qui représente, selon la FCCQ, un «désavantage pour la compétitivité des entreprises québécoises».

La CCMM se dit aussi «préoccupée» par l'imposition d'une taxe temporaire aux institutions et l'abolition du taux réduit de la taxe sur le capital des sociétés d'assurance. «Il faudrait s'assurer que de telles mesures ne se traduiront pas par des coûts d'emprunt et de financement des entreprises plus élevés», note Michel Leblanc, président de la CCMM, par voie de communiqué.

Les manufacturiers et exportateurs du Québec (MEQ) ont aussi témoigné de leur inquiétude sur les impacts de ces deux politiques, surtout en ce qui a trait à la Bourse de carbone.

«Le développement durable ne se fera pas à coup de taxes, mais bel et bien avec des incitatifs sur la modernisation des équipements et le développement de nouvelles technologies», a indiqué Éric Tétrault, président de MEQ.

L'entreprise Gaz Métro est toutefois satisfaite que les entreprises émettant peu de gaz à effets de serre, comme elle, se voient récompensées.

«Ces aides permettront à des entreprises utilisant présentement des combustibles plus polluants de convertir leurs appareils au gaz naturel et ainsi de diminuer leurs émissions des GES d'environ 30 pour cent et de réduire encore plus considérablement leurs émissions de polluants et de particules fines», s'est réjouie Stéphanie Trudeau, vice-présidente, Stratégie, communication et développement durable chez Gaz Métro.

La CCMM, la FCCQ et MEQ ont toutefois salué le gouvernement du Québec pour avoir poursuivi son objectif d'atteindre le déficit zéro.

Or, il reste encore beaucoup de travail à faire, selon le Conseil du patronat du Québec (CPQ).

«Face au chemin qu'il reste à parcourir, soit près de 1 milliard $, le Conseil considère qu'il faudra se rendre capable de soulever les problématiques d'efficience des services et des structures dans les réseaux de la santé, de l'éducation et des garderies», a indiqué le CPQ, par voie de communiqué.

Les gens d'affaires reconnaissent aussi la décision du gouvernement de renouveler son soutien à certaines entreprises.

«Nous saluons l'engagement du gouvernement du Québec de maintenir l'aide aux entreprises. Ces dernières ont déjà contribué pour une grande part à l'effort de rationalisation des dépenses fiscales», a commenté la présidente-directrice Françoise Bertrand.

Cet appui a aussi été qualifié par la Fédération canadienne de l'entreprise indépendante (FCEI) comme une «excellente nouvelle».

Les syndicats s'indignent

Unanimement, les principaux syndicats de la province ont dénoncé les mesures du ministre, qui n'en demanderaient pas encore assez aux entreprises.

Le Syndicat de la fonction publique et parapublique du Québec (SFPQ) considère que le gouvernement «devrait rougir» lorsqu'il affirme demander une «juste part» aux entreprises.

«La contribution supplémentaire demandée aux institutions financières n'est que symbolique. À titre d'exemple, les deux mesures annoncées qui s'adressent à l'ensemble des institutions financières rapporteront 253 millions, soit moins de 1 pour cent des profits des banques (...) C'est vraiment indécent », a lancé Daniel Boyer, président de la Fédération des travailleurs du Québec (FTQ).

Le SFPQ et la FTQ ont aussi critiqué la diminution des déductions d'impôts aux cotisations syndicales, une «attaque contre toute forme de représentation collective», selon M. Boyer.

La FTQ, la CSQ et la Centrale des syndicats nationaux (CSN) ont aussi reproché au gouvernement de vouloir atteindre l'équilibre budgétaire à tout prix.

«Il est extrêmement inquiétant de voir nos dirigeants gouverner le Québec comme s'il s'agissait d'une entreprise privée. Laisser la misère et les inégalités grandir au sein d'une société est loin d'être rentable. Il faut plutôt miser sur la qualité de vie de sa population pour stimuler l'économie», a plaidé Louise Chabot, présidente de la Centrale des syndicats du Québec (CSQ).

«Ce qu'il (le gouvernernement) ne dit pas, c'est que l'effort pour l'atteinte de l'équilibre budgétaire remet en cause le »modèle québécois«. Si on n'arrête pas ce gouvernement au plus tôt, la population toute entière connaîtra des lendemains très douleureux», a renchéri le président de la CSN, Jacques Létourneau.