Même si ses travaux n'ont pas encore débuté, les centrales syndicales craignent que la commission permanente de révision des programmes gouvernementaux du gouvernement Couillard ne se penche uniquement sur les dépenses de l'État sans tenir compte des revenus.

À Montréal, hier, des représentants de la Centrale des syndicats du Québec (CSQ), de la Fédération des travailleurs du Québec (FTQ) et de la Confédération des syndicats nationaux (CSN) se sont montrés inquiets des orientations du premier budget Leitao.

La présidente de la CSQ, Louise Chabot, a rappelé que l'atteinte du déficit zéro dès l'an prochain passera par des compressions de plus de 3 milliards, ce qui risque de compromettre la qualité de la quasi-totalité des programmes sociaux québécois.

«Qu'on se penche sur la révision de nos programmes [...], si c'est dans l'objectif de revoir l'organisation du travail, on peut être du nombre, a-t-elle dit. Mais il y a une différence à se faire proposer une révision [...] dans l'objectif de réduire les coûts de plus de 3 milliards. Là, on ne parle plus de la même chose.»

À ses côtés, le président de la FTQ, Daniel Boyer, a plaidé pour une réflexion afin d'identifier les programmes nécessaires pour ensuite déterminer leur financement plutôt que d'identifier dès le départ un montant d'argent à récupérer.

«L'exercice doit être fait sur quel programme on veut, pas commencer en disant: «J'ai tant d'argent et voici ce qu'il faut enlever de l'assiette de services.» Ça ne marche pas comme cela», a-t-il déploré.

Quant au trésorier de la CSN, Pierre Patry, il a laissé entendre que les conclusions de cette commission avaient l'air d'être «tracées à l'avance» en raison des cibles identifiées dans le budget déposé la semaine dernière.

«Le ministre des Finances préconise les baisses d'impôt pour les entreprises. [...] Il amplifie son problème sur la difficulté d'obtenir des revenus supplémentaires pour financer les services publiques», a-t-il observé.

M. Patry n'est pas contre l'idée d'un «débat de société» sur les programmes sociaux désirés par les Québécois, mais estime que le débat doit être «totalement ouvert» sur les dépenses et les revenus de l'État québécois.

À la défense du modèle fiscal québécois

Les représentants syndicaux ont fait ces commentaires en marge du dévoilement d'une étude de l'Institut de recherche en économie contemporaine (IREC) visant à défendre le modèle fiscal québécois.

Le document avance que le gouvernement du Québec a lui-même créé son problème de revenus puisque le fardeau fiscal des Québécois - qui a atteint un plafond à la fin des années 90 - s'est constamment allégé jusqu'en 2009, dernière année où les données étaient disponibles, selon l'Institut.

«La fiscalité globale a diminué jusqu'à atteindre 37,1% du produit intérieur brut en 2009, soit 3,8 points de pourcentage de moins qu'en 2000», est-il écrit.

D'après le document, si les contributions fiscales étaient demeurées au même niveau qu'elles étaient en 2000, les gouvernements auraient eu en 2009 des recettes supérieures de 11,6 milliards, montant qui aurait été principalement accaparé par Ottawa toutefois.

L'IREC rappelle également que depuis 1981, les taux d'imposition des mieux nantis et des entreprises n'ont cessé de diminuer, ce qui a inévitablement augmenté la pression sur les revenus de l'État québécois.

«Si nous examinons la situation budgétaire du gouvernement, elle s'est détériorée parce qu'il a lui-même scié la branche sur laquelle il était assis, a dit son directeur général, Robert Laplante. On ne peut pas déduire, à ce moment-ci, que le problème est essentiellement du côté des dépenses.»

L'étude de l'IREC, qui deviendra un exercice annuel, visait entre autres à critiquer l'Institut Fraser qui, selon l'organisme, présente la fiscalité comme quelque chose de négatif en identifiant la journée de l'affranchissement fiscal de la famille moyenne, qui sera le 14 juin cette année.

Le président du conseil d'administration de la Caisse d'économie solidaire, Gérald Larose, était également présent aux côtés des représentants syndicaux ainsi que de l'Institut.