L'Accord de libre-échange entre le Canada et la Corée du Sud est bien reçu par les entreprises au Québec qui y voient une porte d'entrée cruciale vers l'Asie, surtout pour les exportations de porc et l'industrie aérospatiale.

L'annonce de la conclusion de l'accord a été faite tôt mardi par le premier ministre Stephen Harper alors qu'il se trouvait en Corée du Sud.

Et si le Québec avait manifesté haut et fort ses inquiétudes pour sa production de fromage dans le cadre de l'accord de libre-échange avec l'Union européenne, celui avec la Corée ne semble pas générer pareilles craintes.

Il n'y en a pas, a affirmé mardi le ministre du Commerce international, Ed Fast, en entrevue avec La Presse Canadienne peu après l'atterrissage de son avion qui revenait de Corée du Sud.

«La gestion de l'offre n'a pas été touchée et les Québécois peuvent être assurés que notre attention a été portée sur leurs industries», a ajouté le ministre.

Cette entente commerciale, la première avec un pays d'Asie, vient d'ouvrir un marché de 50 millions de consommateurs pour les entreprises québécoises et canadiennes. La suppression des droits de douane est un élément-clé de l'accord.

Les entreprises du Québec qui exportaient déjà des produits en demande en Corée, comme le porc, les produits de la mer, ceux de l'érable, le bois, les avions et les trains y voient une occasion de remplir encore plus leurs carnets de commandes, ou encore utiliser ce pays comme un tremplin pour s'implanter dans le reste de l'Asie.

La Chambre de commerce du Montréal métropolitain et la Fédération des entreprises indépendantes accueillent l'accord avec enthousiasme. Cette dernière croit que cela va aider les petites et moyennes entreprises, qui sont nombreuses au Québec.

«Ça nous ouvre une fenêtre sur l'Asie de l'Est», se réjouit Martine Hébert, la vice-présidente de la Fédération.

«Ça nous met sur un pied d'égalité avec nos voisins du sud», ajoute-t-elle.

Et selon Mme Hébert, les PME recevront un bon coup de main. Même si en aérospatiale les joueurs sont surtout de très grosses entreprises, leurs sous-traitants sont souvent des PME, qui vont profiter de l'accord indirectement, souligne-t-elle.

«Il y a des centaines de petites entreprises au Québec qui vont participer dans la chaîne d'approvisionnement», a renchéri le ministre Fast. Pour pouvoir compétitionner, les PME doivent avoir un accès facilité au marché, dit-il.

Le géant Olymel croit que la Corée du Sud sera un marché prometteur pour l'industrie porcine car les Coréens «sont friands de coupes fraîches et de coupes congelées de porc».

La majeure partie des produits de porc d'Olymel exportés en Corée provient des élevages québécois.

Mais l'industrie porcine avait notamment perdu sa compétitivité lorsque les barrières tarifaires avaient été abolies entre les États-Unis et la Corée.

«L'industrie canadienne du porc subissait depuis deux ans les contrecoups de l'entente de libre-échange entre les États-Unis et la Corée du Sud entrée en vigueur en 2012, c'est-à-dire une baisse inexorable des exportations canadiennes de porc», a souligné le président-directeur général d'Olymel, Réjean Nadeau, dans un communiqué.

L'entreprise estime de plus que cet accord constitue une étape importante pour la signature d'autres ententes commerciales bilatérales en Asie.

«On n'était même plus sur la liste de fournisseurs des Coréens, souligne David Boissonneault, président des Éleveurs de porcs du Québec. Nos transformateurs disaient que les Coréens ne les rappelaient même pas!»

«Ça sécurise l'avenir», ajoute-t-il.

Le seul point négatif qu'il souligne est que l'accord «aurait dû être signé bien plus tôt».

Mais il n'est pas trop tard, souligne le ministre du Commerce international.

«Je suis confiant que les entreprises (de l'industrie porcine) puissent effectuer un retour dans le marché, regagner leur part et même l'augmenter», affirme M. Fast. La qualité du porc d'ici n'a pas d'égal, ajoute-t-il.

Il croit pouvoir signer l'entente finale au début de 2015, et caresse même un espoir pour 2014. Les provinces n'étant pas partie à l'accord comme pour celui avec l'Europe, la finalisation du projet est plus simple.

La multinationale québécoise Bombardier, qui est déjà bien présente en Corée du Sud, salue la conclusion de l'accord. Celui-ci abolit notamment les tarifs pour les avions et les trains, ce qui est évidemment favorable à l'entreprise. L'entente inclut aussi des protections supplémentaires pour les investissements canadiens là-bas et facilite l'entrée de professionnels comme les ingénieurs, a précisé une porte-parole de l'entreprise, Isabelle Rondeau.

Le Nouveau Parti démocratique (NPD) accueille bien l'entente, mais avant de trop se réjouir, il veut en voir tous les détails. Le NPD déplore d'ailleurs le secret qui a entouré les négociations.

«Ça manque de transparence, a déclaré le député néo-démocrate Guy Caron, porte-parole en matière de commerce international.

Ainsi, selon lui, le peu de détails dévoilés sur l'accord fait en sorte qu'il est ardu de voir pour le moment si des industries du Québec seront défavorisées.

«Il est difficile de discerner des gagnants clairs et des perdants clairs», dit-il.