La fondatrice et députée du parti de gauche Québec solidaire, Françoise David, a choisi la politique pour combattre les inégalités sociales. Ce n'est pas le chemin le plus facile ni le plus rapide pour faire valoir ses idées. Issue d'une famille à l'aise d'Outremont, elle aurait pu devenir riche et redistribuer son argent directement aux moins nantis, à la manière de Robin des bois.

Elle rit de cette idée. «Il aurait fallu que j'exerce un métier payant, comme actuaire ou médecin, mais ça ne m'intéressait pas», dit-elle.

Le mécénat et la philanthropie, qui prennent de plus en plus de place au Québec parce que les coffres de l'État sont vides, ne sont pas la solution, dit Françoise David.

«Je n'aime pas l'idée que quelques mécènes décident quelles compagnies de danse ou quelles causes sociales méritent de vivre, dit-elle. Je trouve ça profondément antidémocratique.»

Faire plus

Le Québec fait peut-être plus que ses voisins nord-américains pour réduire les inégalités sociales, mais il pourrait en faire davantage.

«On fait mieux notre job comme société qu'aux États-Unis, par exemple, reconnaît Françoise David, mais notre prétention, c'est qu'on peut faire encore mieux.»

Ce n'est pas normal, dans une société comme le Québec, que des travailleurs au salaire minimum doivent fréquenter les banques alimentaires, comme ça arrive de plus en plus aujourd'hui, dit-elle.

«L'idée est qu'une personne qui travaille 40 heures par semaine ne devrait pas vivre dans la pauvreté», affirme-t-elle de son ton égal, habituée à frapper sur le même clou.

Trouver l'argent là où il est

Il n'y a pas tant de solutions possibles, selon elle. «Si on veut réduire les inégalités, on n'a pas le choix. Il faut convaincre les 1% ou les plus riches qu'ils doivent contribuer plus.»

Les entreprises, surtout, peuvent faire davantage, croit Françoise David. «Je ne parle pas du dépanneur du coin, mais des grandes entreprises qui ont les moyens de faire plus.»

Il faudrait augmenter les redevances des sociétés minières, il faudrait taxer davantage les profits des banques. «Elles ne partiront pas au Mexique, parce que c'est avec nos ressources et notre argent qu'elles font des profits.»

Il faut commencer par augmenter le salaire minimum, ce qui ne coûte rien à l'État.

Il faut aussi augmenter les prestations d'aide sociale. «On ne le fait pas parce qu'on dit que les gens vont aimer ça, être sur l'aide sociale. Moi, je ne connais personne qui aime ça.»

Il n'y a pas de raison que les revenus de dividendes et de gains en capital soient imposés à 50%, alors que les salaires de la classe moyenne sont imposés à 100%, croit aussi Françoise David. «C'est par des moyens comme ça qu'on peut aller chercher plus d'argent, mais quand on [le gouvernement Marois] a voulu le faire, ç'a été une levée de boucliers.

«Quand on a parlé de l'angoisse fiscale des riches, je n'ai pas pu m'empêcher de rire.»

La paix, ça se paie

Il n'y a pas beaucoup de grandes fortunes au Québec, reconnaît Françoise David, mais un couple qui gagne 200 000$ ou 300 000$ ici peut être considéré comme riche, selon elle.

«Ils vivent dans la paix sociale. Ils profitent d'une panoplie de services publics. L'électricité coûte moins cher qu'ailleurs, les maisons aussi, énumère-t-elle. Les gens plus riches n'ont pas besoin d'entourer leur maison de barbelés et de tessons de bouteille comme dans certains pays. Une femme peut marcher dans la rue le soir à Montréal sans se faire voler.»

Ce sont des choses qui se paient, dit la députée. Et ceux qui se plaignent que 50% de leurs revenus sont aspirés par le fisc ne lui inspirent pas de pitié.

«J'ai de la misère à trouver ça grave. Ils en ont plus pour leur argent qu'ailleurs. Ils peuvent bénéficier de tous les services publics et ils peuvent aller au privé si ça ne fait pas leur affaire, parce qu'ils en ont les moyens.»

«La vraie question est: seraient-ils en mesure de faire plus? Ma réponse à moi, c'est oui.»

Si la grogne contre les 1% des plus riches augmente, c'est parce que les services publics financés par les impôts diminuent ou deviennent moins accessibles. «Ce qui est grave, c'est le quidam de la classe moyenne, qui paie ses impôts, qui se fait dire qu'il doit aller au privé s'il ne veut pas attendre des mois pour une opération, par exemple. C'est de là que vient la colère des contribuables.»