L'aventure du Fonds de solidarité FTQ dans la transformation du cuivre se traduit par une perte sèche de plus de 15 millions de dollars. Fermée depuis juin 2012, l'usine Mango de Montréal-Est, dont le Fonds était l'unique actionnaire, vient d'être revendue et deviendra un centre de tri de matériaux secs.

Ce sont les propriétaires de Construction Fortin, de Montréal, Frédéric Fortin et Martin Leclerc, qui acquièrent l'usine de 400 000 pieds carrés. Ils achètent la propriété à un prix de 7,5 millions d'American Iron&Metal (AIM), qui appartient à l'homme d'affaires Herbert Black. Les acquéreurs n'ont pas rappelé La Presse.

AIM, qui était fournisseur de Mango industrie du cuivre, était devenue propriétaire de la bâtisse et du terrain de plus de 1 million de pieds carrés en payant la somme symbolique de 1$ en échange de la totalité des actions de Mango, toutes détenues par le Fonds FTQ. AIM s'est engagée à décontaminer le terrain, une facture évaluée entre 4,4 et 14,3 millions, selon une évaluation indépendante.

«La propriété va être réhabilitée comme prévu avec le Fonds FTQ, assure Mathieu Germain, directeur de l'environnement d'AIM, que nous avons joint au téléphone. Le travail a d'ailleurs commencé en janvier 2013 avec la caractérisation du site, qui est maintenant terminée.»

De son côté, le Fonds FTQ a confirmé ne plus être responsable de la décontamination du site à la suite de la vente de ses actions dans Mango. Il a ainsi récupéré la somme de 6,8 millions qu'il avait mise de côté à cette fin.

Outre le cautionnement de 6,8 millions, le Fonds avait investi 15,5 millions en actions et 2,1 millions en avances diverses dans Mango, selon son rapport annuel 2012. Ses pertes dépassent donc les 15 millions.

Le porte-parole du Fonds, Patrick McQuilken, a refusé de confirmer le chiffre de 15 millions de pertes.

Pourtant, un rapport public produit par le syndic au dossier, Raymond Chabot, indique que le Fonds FTQ a obtenu 1$ pour la totalité des actions de Mango et que sa créance sera considérée comme une créance ordinaire. Un remboursement de 6 cents par dollar a été estimé par Raymond Chabot. «Je ne commenterai pas un document qui ne relève pas du Fonds», a rétorqué M. McQuilken.

Des pertes de 10 millions pour Mango

Née de l'acquisition des éléments d'actif de Tubes Wolverine en 2007, la société Mango a commencé ses activités en avril 2009. À l'époque, le Fonds voulait sauver des emplois et assurer la pérennité de la dernière usine canadienne de production de fils et de barres de cuivre servant d'intrants dans la fabrication de produits électriques et à la production d'aluminium par électrolyse.

Les résultats n'ont malheureusement jamais été au rendez-vous: Mango a accumulé plus de 10 millions de pertes en 3 ans. Ses déboires se sont accentués quand une société d'affacturage a cessé de financer ses comptes clients en avril 2012, ce qui l'a plongée dans une crise de liquidités. Mango a d'ailleurs déposé dans les jours suivants un avis d'intention de soumettre une proposition à ses créanciers en vertu de la Loi sur la faillite et l'insolvabilité.

Ses 70 travailleurs ont perdu leur emploi en juin 2012. La Ville de Montréal-Est absorbe 2,4 millions en taxes impayées.

Financé par le vendeur

Les acquéreurs de l'usine Mango se font financer la totalité de leur achat par AIM à un taux d'intérêt annuel de 5%. MM. Fortin et Leclerc paieront 31 250$ par mois à AIM pendant deux ans, puis 89 529$ par mois pendant les huit années suivantes. Le vendeur a pris toutes sortes d'hypothèques sur la propriété pour assurer ses arrières.

«AIM ne fait aucunement de tri de matériaux secs, et les acquéreurs sont nos amis, explique Mathieu Germain. Ils sont dans le domaine du recyclage. Tout le monde se connaît dans le domaine du recyclage.»

MM. Fortin et Leclerc sont aussi copropriétaires de Koncas recyclage, qui exploite un centre de tri dans l'est de Laval, à proximité des installations du ferrailleur SNF, propriété depuis quelques années d'AIM.

AIM est un acteur majeur de l'industrie du recyclage de métaux avec plus de 40 usines, surtout au Québec, mais aussi à Winnipeg, Halifax et Cleveland (Ohio). Son siège social est situé à Montréal-Est.