Avec sa future Banque de développement, le gouvernement du Québec se lancera dans une activité où il est très peu présent actuellement: le financement de toutes petites entreprises.

La Banque, qui doit naître de la fusion du bras financier du gouvernement, Investissement Québec (IQ), et de certaines composantes du ministère des Finances et de l'Économie, pourra prendre des participations de quelques centaines de milliers de dollars à peine dans des PME québécoises.

À l'heure actuelle, IQ investit rarement moins de 5 millions $ dans le capital-actions d'une entreprise. De son côté, le gouvernement accorde des subventions et des prêts dont la valeur oscille entre quelques milliers de dollars et plusieurs dizaines de millions de dollars, mais n'achète jamais d'actions d'entreprises.

Au cours d'une entrevue récente, le président-directeur général d'IQ, Jacques Daoust, a reconnu que le gouvernement allait accroître son risque financier en permettant à la Banque de devenir actionnaire de PME. Il a toutefois précisé que la Banque allait «gérer» ce risque additionnel en effectuant un suivi étroit des entreprises dans lesquelles elle allait investir.

Cette surveillance s'effectuera principalement par le biais des bureaux régionaux d'IQ et du ministère, qui deviendront ceux de la Banque une fois que celle-ci aura été créée par une loi de l'Assemblée nationale, possiblement ce printemps.

La Banque de développement devrait ainsi faciliter les démarches des entrepreneurs en jouant le rôle de guichet unique, a noté M. Daoust.

Il reste que l'abaissement du seuil des investissements nécessitera des ajustements.

«C'est souvent plus compliqué de faire un dossier de 300 000 $ qu'un dossier de 3 millions $ parce que l'information financière disponible n'est pas la même (dans une très petite entreprise)», a fait remarquer Jacques Daoust, en assurant toutefois que les fonctionnaires d'IQ et du ministère avaient toutes les compétences requises pour accomplir le nouveau mandat.

Le mois dernier, le ministre des Finances et de l'Économie, Nicolas Marceau, a déclaré que la Banque n'allait pas être un bar ouvert pour des projets de toute nature. À l'instar d'IQ, la Banque se tiendra loin de certains secteurs, comme l'immobilier et le commerce de détail, jugés trop risqués ou non stratégiques.

M. Daoust a reconnu que les investissements en capital-actions dans de petites entreprises pourraient faire en sorte que la rentabilité de la Banque de développement soit moindre que celle d'IQ. Mais comme IQ réalise des profits nets de plus de 50 millions $ par année, il est fort peu probable que la nouvelle stratégie fasse sombrer la Banque dans le rouge.

«Le gouvernement ne s'attend pas à ce que je fasse des profits mirobolants, mais à ce que je ne lui coûte rien», a souligné Jacques Daoust.

Selon lui, cette incursion du gouvernement dans le capital-risque destiné aux PME sera complémentaire à ce que font déjà le Fonds de solidarité FTQ, Fondaction CSN et Capital régional et coopératif Desjardins.

«Il arrive des moments où, pour des raisons économiques, tu vas poser des gestes que tu ne pourrais pas poser sur une base purement financière», a-t-il affirmé.

M. Daoust, qui dirige Investissement Québec depuis juin 2006 et dont le deuxième mandat prend fin le 31 décembre, n'a pas encore décidé s'il allait poser sa candidature pour le poste de PDG de la Banque de développement.

«Je ne suis pas fermé à ça du tout», a-t-il néanmoins dit.

Jacques Daoust a par ailleurs indiqué que les Fonds d'intervention économique régionaux (FIER), mis sur pied par le précédent gouvernement libéral, allaient être graduellement liquidés au cours des sept à huit prochaines années.

Il s'attend à ce que le gouvernement récupère entre 85 et 90 pour cent des quelque 200 millions $ investis par Québec dans les FIER, qui ont connu des problèmes de gestion en 2009. Les sommes récupérées seront vraisemblablement consacrées aux divers programmes d'aide financière aux entreprises.