La firme d'ingénierie et de construction canadienne SNC-Lavalin, en pleine tourmente depuis des mois, vient de montrer discrètement la porte à trois de ses hauts dirigeants liés à sa division hydroélectrique, a appris La Presse.

Selon nos informations, les trois personnes concernées sont Joseph Salim, vice-président principal et directeur général de la division Hydro, John Brown, vice-président, responsable du développement des affaires pour l'Afrique et l'Amérique latine, ainsi que Jean-Pierre Mourez, qui était établi à Paris. John Brown et Jean-Pierre Mourez étaient plus particulièrement chargés du bureau angolais de la firme, selon ce qui est indiqué dans différents documents.

Leur départ remonte à lundi. La plupart des employés concernés en ont été informés verbalement depuis, lors de réunions avec leurs supérieurs dans les bureaux du groupe. On n'en sait pas plus sur les motifs de ce qui a été présenté à l'interne comme un limogeage, sauf que l'affaire semblait être manifestement une «patate chaude» et un défi de communication externe, nous a-t-on dit.

SNC-Lavalin n'a pas répondu aux questions de La Presse. En soirée, Leslie Quinton, porte-parole du groupe, a simplement indiqué ceci par courriel: «Selon la politique interne et la loi, SNC-Lavalin ne peut pas commenter ou donner les détails sur le départ de ses employés. Ce sujet relève de leur vie privée.» La firme a finalement confirmé un peu plus tard le départ des trois hommes.

La division hydroélectrique de la firme canadienne a obtenu, au cours des dernières années, quelques contrats d'importance en Afrique pour la restauration ou la construction de barrages. C'est le cas du barrage Matala, en Angola, une structure datant des années 70 et dont l'évacuateur de crue sera rénové par la filiale SNC-Lavalin Angola Limitada. La valeur totale du projet est de 280 millions.

SNC-Lavalin est également engagée dans la construction d'un barrage sur le fleuve Niger en Guinée, et d'un autre en République démocratique du Congo.

Enquêtes et allégations

Depuis des mois, les enquêtes et les allégations se multiplient sur certaines pratiques au sein de la firme, en particulier le versement de pots-de-vin, pour obtenir de juteux contrats à l'étranger, ainsi que les stratagèmes employés pour cacher ces sommes dans les budgets.

La firme est notamment en position délicate en Tunisie. La Commission d'investigation sur la corruption et les malversations (CICM) enquête sur l'attribution d'un contrat de 320 millions de dollars par l'ancien régime pour la construction d'une centrale thermique. Sans oublier une enquête de la GRC et de la Banque mondiale sur des allégations de corruption au Bangladesh pour la construction du pont Pandma.

L'ex-PDG de la firme Pierre Duhaime a quant à lui été arrêté le 27 novembre dernier par l'Unité permanente anticorruption et accusé de fraude, de complot et d'usage de faux, dans le cadre de l'enquête sur la construction du Centre universitaire de santé McGill (CUSM). Pierre Duhaime et l'ex-patron de SNC pour l'Afrique du Nord, Riadh Ben Aïssa, aussi visé par le mandat d'arrêt bien qu'il soit détenu en Suisse, auraient été mêlés à des paiements irréguliers de 22,5 millions pour obtenir le contrat du CUSM, a déjà rapporté La Presse.