La Caisse de dépôt et SNC-Lavalin n'ont aucun intérêt à acquérir les actifs de Tony Accurso s'ils sont mis en vente. Et fait, malgré le souhait de l'entrepreneur de conserver ses entreprises au Québec, ce sont surtout les firmes étrangères qui risquent de se porter acquéreur, selon les observateurs consultés par La Presse Affaires.

Tony Accurso a causé une commotion, hier, en annonçant qu'il quittait le monde des affaires. Tout est sur la table concernant l'avenir de ses nombreuses entreprises, y compris leur vente en bloc ou en morceaux. Les diverses ramifications de l'empire Accurso génèrent ensemble des ventes annuelles de 1 milliard de dollars, selon les estimations. Comme la marge de profit n'est pas connue, bien malin qui pourra dire combien elles valent sur le marché. Des sources estiment la valeur de l'ensemble quelque part entre 100 et 500 millions.

Qui pourrait acquérir les actifs de l'entrepreneur en construction le plus actif au Québec? Dans l'industrie, le nom de SNC-Lavalin circule depuis longtemps comme possible acquéreur. SNC s'est associée à Louisbourg SBC et Simard-Beaudry, deux sociétés d'Accurso, pour rafler deux des plus gros contrats de construction au Québec, la reconstruction de l'échangeur Turcot et le chantier du Centre universitaire de santé McGill.

Sortant de sa réserve habituelle, SNC-Lavalin a cependant complètement fermé la porte à une telle possibilité, hier.

«Il n'y a pas d'intérêt de notre part», a tranché Leslie Quinton, vice-présidente aux communications, dans un échange de courriels avec La Presse Affaires.

M. Accurso ne pourra non plus compter sur l'aide de la Caisse de dépôt pour conserver l'empire qu'il a bâti au Québec.

«Nous discutons rarement de nos stratégies d'investissement à l'avance, mais, dans ce cas-ci, il est clair que nous ne sommes pas intéressés», a fait savoir un porte-parole de la Caisse.

Les deux sociétés n'ont pas voulu expliquer les raisons de leur refus. Rappelons toutefois que les deux principales filiales de l'organisation d'Tony Accurso ont déjà plaidé coupables à des accusations de fraude fiscale, et que son groupe a fait l'objet de perquisitions de la GRC et de l'escouade Marteau. M. Accurso est lui-même accusé de corruption.

Le Fonds de solidarité FTQ a quant à lui refusé de dire s'il pourrait se porter acquéreur des actifs advenant une vente.

Les étrangères aux premières loges

Pomerleau, l'un des plus gros entrepreneurs en construction de la province, n'achètera pas non plus les actifs d'Accurso. La raison est simple: l'entreprise a acheté pas plus tard que la semaine dernière le géant québécois de la construction Neilson et doit digérer son acquisition.

Le PDG, Pierre Pomerleau, qui vient de voir comment se négocie l'achat d'une entreprise de construction au Québec, observe toutefois que les entreprises étrangères sont très motivées à acheter au Québec.

«Des entreprises espagnoles, françaises, anglaises vont être là, a-t-il prédit en parlant des actifs d'Accurso. Il y a de gros projets de construction qui s'en viennent au Québec et ça suscite de l'intérêt. Quand on a acheté Nielson, je n'avais aucune concurrence québécoise. C'était seulement des entreprises étrangères.»

L'espagnole Grupo ACS ou l'américaine Kiewit, par exemple, font partie des prétendants possibles, selon les observateurs. La canadienne Aecon, qui est cotée en Bourse (à ne pas confondre avec la firme de génie américaine Aecom) pourrait aussi sauter dans la mêlée advenant une vente.

Parmi ceux qui montrent de l'intérêt à prendre la relève de Tony Accurso se trouvent... ses enfants eux-mêmes. En entrevue au journal Les Affaires, sa fille Lisa a affirmé hier qu'elle et ses frères étaient prêts à sauter, mais que leur père avait écarté cette possibilité.