Où trouver 1 milliard pour compenser l'abolition de la taxe santé? La tâche semble titanesque. Pourtant, en fouillant dans les finances de l'État, nos journalistes ont déterré un tas de mesures inefficaces, coûteuses ou carrément inutiles.

Aide aux entreprises

3,4 milliards par année

Les entreprises paient de l'impôt d'un côté et reçoivent de l'autre de l'aide financière du gouvernement sous forme de subventions et de crédits d'impôt. Les crédits d'impôt et autres congés fiscaux ont coûté 3,4 milliards au Trésor public en 2011. Le Québec dépense deux fois plus que l'Ontario en aide aux entreprises. Même les entreprises conviennent qu'il y a des économies importantes à faire dans ces dépenses qui ont augmenté en moyenne de 4,4 % par année depuis 2006.

- Hélène Baril

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Crédits d'impôt pour la pratique sportive et artistique

Une dépense de 47 millions par année

Le PQ a promis deux crédits d'impôt remboursables de 500$ pour les parents qui inscrivent leurs jeunes de 5 à 16 ans à des activités sportives ou artistiques. Réservé aux familles dont le revenu annuel est de moins de 130 000$, chacun de ces crédits redonnera environ 100$ par enfant. Une mesure inutile parce qu'elle ne rendra pas ces activités plus accessibles: si vous n'avez pas les moyens de dépenser 500$, ce n'est pas la possibilité d'en récupérer 100$ qui changera la donne.

- Ariane Krol

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Crédit d'impôt pour droits de scolarité

Payer plus tard

Durant les négociations avec les étudiants au printemps dernier, le gouvernement a proposé de limiter la hausse des droits de scolarité en réduisant en contrepartie le crédit d'impôt pour droits de scolarité, que les étudiants peuvent réclamer plusieurs années après la fin de leurs études. Les fédérations étudiantes étaient favorables et auraient même souhaité aller plus loin pour annuler complètement la hausse. Le fiscaliste Luc Godbout, de l'Université de Sherbrooke, avait déclaré à La Presse Affaires que limiter les hausses des droits en réduisant le crédit d'impôt dégageait de l'argent - 136 millions selon les données de 2010 - pour le gouvernement tout en favorisant l'accessibilité aux études des moins nantis. Ceux-ci n'ont pas nécessairement les moyens de payer davantage en attendant les crédits d'impôt plus tard.

- La Presse Affaires

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Dépenses fiscales

Couper là où ça fait moins mal

Il y a des économies à faire du côté des dépenses fiscales, c'est à dire des déductions accordées pour différentes raisons. La section québécoise de la Fédération canadienne de l'entreprise indépendante estime que ce serait moins dommageable pour l'économie qu'une augmentation d'impôt. Elle suggère de réduire les crédits d'impôt pour les investissements dans les fonds de travailleurs et ceux accordés aux cotisations syndicales. Autre proposition : taxer les gains de loterie et de jeux, une mesure qui, à elle seule, permettrait au gouvernement d'engranger 400 millions par année.

- Hélène Baril

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Industrie pharmaceutique

Une compensation controversée

La «règle des 15 ans» est une mesure de soutien à l'industrie pharmaceutique qui stipule que Québec paie aux patients la version originale d'un médicament pendant 15 ans, même si des versions génériques moins chères apparaissent sur le marché pendant cette période.  

Le coût de cette mesure a explosé de près de 600% et devrait atteindre 174 millions cette année, selon les chiffres du gouvernement. Or, la plupart des chercheurs s'entendent pour dire que les coûts de la règle surpassent probablement aujourd'hui largement ses bénéfices. La règle des 15 ans avait été conçue pour encourager la recherche pharmaceutique, mais n'a pas empêché l'exode des grands laboratoires de recherche hors de la province au cours des dernières années. Il y a un mois, l'Institut de recherche en économie contemporaine a publié une étude affirmant que Québec pourrait économiser 1 milliard par année en revoyant ses politiques d'achats de médicaments. Ces conclusions avaient toutefois été remises en question par d'autres chercheurs.  

- Philippe Mercure

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Fonds des générations

Une contribution superflue

Le Parti québécois s'est engagé à abolir le Fonds des générations et à utiliser sa cagnotte pour réduire directement la dette.

Au 31 mars prochain, celle-ci sera d'environ 5,5 milliards, si Québec y affecte toutes les sommes prévues dans le budget déposé en mars. Le ministre des Finances d'alors, Raymond Bachand, prévoyait y consacrer les 718 millions perçus en redevances hydrauliques et le rendement de près de 200 millions attendu de la Caisse de dépôt et placement sur les quelque 4,3 milliards qui y étaient déposés déjà au 31 mars. La Caisse paraît bien placée pour livrer ces millions.

M. Bachand avait aussi prévu allouer cette année au Fonds le surplus de 300 millions accumulé au fonds d'information sur le territoire. Cela supposait un amendement à la loi, amendement qui n'a pas été adopté.

Libre à M. Marceau d'allouer ce surplus ou une partie des redevances à d'autres fins.

- Rudy Le Cours

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Technologies de l'information

L'exemple de la France

En renouvelant des systèmes et des licences informatiques qui lui coûtent quelque 2,6 milliards de dollars, Québec paierait jusqu'à 10 fois trop pour son infrastructure informatique, si on se fie aux plus récentes études à ce sujet.

C'est le premier ministre français Jean-Marc Ayrault qui l'affirme: à la suite d'expériences concluantes au sein de la fonction publique française, il vient de publier une dizaine de directives simples reposant sur un usage systématique du logiciel libre. Selon lui, elles permettront «de diviser par 10 les coûts de fonctionnement» technologiques de l'Hexagone.

Ça semble vérifiable: Cyrille Béraud et sa PME, Savoir-Faire Linux, ont récemment réalisé un projet TI pour un peu moins de 500 000$ à Québec. Initialement, le Conseil de la fonction publique évaluait son coût à 5 millions. «Le facteur de 1 à 10 ne sera pas universel, mais c'est un ratio qu'on observe de façon généralisée dans plusieurs cas où on passe au logiciel libre», assure-t-il.

Selon ce calcul, Québec aurait donc sous la main un potentiel d'économie de 2,3 milliards en revoyant la gestion des TI de ses ministères.

- Alain McKenna, collaboration spéciale

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Fonds de Solidarité FTQ


Économiser tout en conservant l'avantage fiscal

Le crédit d'impôt versé aux nouveaux investisseurs du Fonds de Solidarité FTQ est de 15% au fédéral et au provincial. Il y a quelques années, ce crédit a été ramené de 20% à 15% par les deux gouvernements. Une nouvelle baisse de cinq points de pourcentage permettrait d'économiser environ 67 millions par an, dont la moitié au Québec. Le Fonds FTQ conserverait tout de même un avantage fiscal avec un crédit d'impôt de 10%.

- Francis Vailles

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Écoles privées

Droits de scolarité, bis

En réduisant de 4% les subventions aux écoles privées (environ 100$ par enfant), Québec économiserait 22 millions par an. Selon plusieurs économistes, une telle hausse serait trop faible pour affecter à la baisse la fréquentation du privé et gonfler les rangs du secteur public. Il s'agirait donc d'une rentrée nette de fonds prélevée à des gens qui en ont les moyens.  

- Francis Vailles

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Électricité

Plus de 500 millions

Hydro-Québec pourrait économiser annuellement plus d'un demi-milliard par année en cessant d'acheter à des producteurs privés de l'énergie dont elle n'a pas besoin. Il s'agit de contrats d'approvisionnement accordés à des papetières comme Kruger et Résolu ou encore des achats garantis auprès de promoteurs de petites centrales hydroélectriques et de parcs éoliens. Hydro pourrait aussi économiser la compensation de 200 millions par année qu'elle verse à TransCanada Energy pour ne pas utiliser sa centrale au gaz de Bécancour, étant donné que cette énergie sera nécessaire en hiver maintenant que la fermeture de Gentilly-2 est officielle.

- Hélène Baril

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Délégations et bureaux du Québec à l'étranger

Des frais qui explosent

Québec a payé l'année dernière environ 3,1 millions de dollars pour sa délégation générale à Bruxelles, et près de 1 million pour son bureau à Barcelone. Il en a aussi à Paris, Munich, Londres... mais aussi Vienne et Atlanta. Au total, le Québec compte 28 bureaux et délégations dans le monde.

De 2003 à 2009, le coût moyen d'opération était de 45 millions. L'année suivante, le coût est passé à 55 millions, une augmentation de près de 30%. La somme devait être d'environ 55 millions cette année. Cela représente près de la moitié du budget du ministère des Relations internationales (115,9 millions pour 2012-13).

Quand l'Action démocratique du Québec avait critiqué ces dépenses, le premier ministre Charest s'était montré furieux. Près de la moitié du PIB du Québec provient des exportations, avait-il souligné. Quant à l'augmentation des budgets, la ministre Gagnon-Tremblay l'attribuait aux variations dans les taux de change et aux hausses de loyer à l'étranger.

- La Presse Affaires

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La parole est à vous

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