La situation financière du Québec est bien plus sombre que celle esquissée par l'ancien gouvernement libéral, a constaté vendredi le ministre péquiste des Finances, Nicolas Marceau.    

«La situation que nous découvrons graduellement nécessitera un virage important dans la gestion», a déclaré M. Marceau en conférence de presse à Montréal en compagnie de son collègue président du Conseil du trésor, Stéphane Bédard, qui a pour sa part exprimé une vive inquiétude face aux dépassements de coûts dans les infrastructures.

«La croissance économique est moins forte que ne l'anticipait l'ancien gouvernement et les dépassements anticipés aux dépenses sont supérieurs. Au total, les risques s'élèvent à 1,6 milliard $ en 2012-2013», a indiqué M. Marceau.

Une consommation moins vigoureuse et une croissance économique en baisse, mais aussi un relâchement de la rigueur, ont accentué les pressions sur les finances publiques, ont expliqué MM. Marceau et Bédard, ce dernier insistant sur les dépenses effectuées à l'approche des élections.

«Les libéraux avaient lâché les commandes du navire. À l'évidence, on était dans un agenda qui était beaucoup plus électoral que financier. On a choisi de plaire à la population plutôt que de chercher à bien faire», a dénoncé M. Bédard.

Néanmoins, il n'est pas question de hausser le déficit de l'année en cours, maintenu à 1,5 milliard $. L'atteinte de l'équilibre budgétaire demeure prévue pour l'année financière 2013-2014, a indiqué le ministre des Finances.

Nicolas Marceau a par ailleurs soutenu que la perte qui serait engendrée par la fermeture de la centrale nucléaire Gentilly-2, qui pourrait se situer autour de 1,7 milliard $ mais qui reste à préciser, n'aurait aucun impact sur le déficit, bien qu'elle devrait être ajoutée à la dette publique. Selon lui, il s'agit tout simplement d'une perte exceptionnelle à inscrire aux livres.

«Cette question est complètement indépendante de la gestion des revenus et dépenses du gouvernement, a expliqué le ministre. L'an prochain cela ne nous affectera plus. L'équilibre budgétaire sera atteint comme prévu. Ce n'est pas parce que les bonnes décisions économiques ont des effets comptables qu'il ne faut pas les prendre.»

Du côté des infrastructures, Stéphane Bédard a qualifié la situation d'«inquiétante».

Faisant référence aux 20 plus importants projets d'investissement, il a révélé qu'une révision préliminaire démontrait qu'entre le moment où ils ont été provisionnés au Plan d'investissement du Québec et le moment où ils étaient en cours de réalisation ou même, dans certains cas, avant la réalisation, les coûts avaient augmenté de 80 pour cent en moyenne.

M. Bédard a donc demandé un audit de ces projets par une firme indépendante dont il attend le résultat dans les 30 jours.

À Québec, pendant ce temps, l'opposition libérale a choisi de passer à l'attaque plutôt que de défendre sa gestion des deniers publics.

Le gouvernement péquiste se comporte «comme une poule pas de tête», a imagé le porte-parole libéral responsable des dossiers du Conseil du trésor, Sam Hamad.

Le dépassement des dépenses en cours d'exercice n'a rien de singulier, a dit M. Hamad en conférence de presse. Année après année, les ministres des Finances sont confrontés à ce phénomène et parviennent à colmater les brèches, a-t-il fait remarquer.

Chaque année, il y a des coûts qu'on n'a pas prévus, mais pour respecter notre budget, on coupe ailleurs. On a fait ça pendant neuf ans (au gouvernement), c'est habituel», a soulevé M. Hamad.

Mais en ce qui a trait au ralentissement de la croissance économique et au déclin de la consommation, le gouvernement péquiste n'a rien à proposer sinon de «taxer les gens et bloquer le développement», a-t-il dénoncé.

Il a reproché au gouvernement d'exagérer le manque à gagner afin de se créer une provision pour justifier les dépenses engendrées par ses promesses et il a, du même coup, mis en doute sa capacité de maintenir le cap sur l'équilibre budgétaire en 2013-1014.

Le déficit zéro «est menacé», a estimé M. Hamad.

En arrivant au pouvoir en 2003, les libéraux de Jean Charest avaient eux aussi poussé les hauts cris devant la situation des finances publiques. Le rapport qu'ils avaient commandé à l'ancien vérificateur général Guy Breton faisait état d'un déficit caché de plus de 4 milliards $.