Tout ne va pas mal pour le nouveau ministre des Finances du Québec, Nicolas Marceau, qui tente de résoudre la quadrature du cercle en trouvant des revenus supplémentaires de 1 milliard sans hausses d'impôt rétroactives, alors que faiblit la croissance de l'économie.

Il peut trouver un modeste soulagement à constater que les coûts d'emprunt de la province ont diminué depuis l'été.

En revanche, la bisbille des derniers jours sur les hausses d'impôt a fait augmenter légèrement les taux d'intérêt des obligations du Québec à longue échéance par rapport à celles de l'Ontario, sur le marché secondaire.

La première nouvelle est rassurante au moment où Québec doit renouveler une importante échéance de 2,3 milliards, le mois prochain. La seconde pourrait en revanche signifier que Québec ne pourra pas réaliser toutes les économies à sa portée sur les marchés, s'il ne parvient pas à les convaincre de sa capacité à gérer les finances publiques.

Les titres arrivés à maturité sont des obligations de 10 ans qui portaient un coupon de 6%. Il sera bien plus faible cette fois-ci, si on se fie à l'émission de 500 millions réalisée la semaine dernière, la deuxième depuis l'élection du gouvernement minoritaire péquiste.

Mardi, le Québec a vendu une tranche de 500 millions d'obligations venant à échéance dans 30 ans pour laquelle il a consenti un taux de 3,494% seulement. Lors de l'émission précédente d'une pareille tranche, le 3 mai, le rendement consenti était très faible, mais tout de même plus élevé: 3,674%.

Il s'agissait de la deuxième émission en moins d'une semaine, après trois mois d'absence sur les marchés. La précédente avait précisément une échéance de 10 ans. Le taux consenti a été de 2,991%. Fin juin, Québec avait dû offrir 2,965%.

«La demande était forte au point où l'émission était pratiquement prévendue, affirme Jean-François Godin, vice-président recherches chez Valeurs mobilières Desjardins. Pour les émetteurs, c'est le meilleur des mondes: il y a des acheteurs et les taux sont faibles.»

Dans l'avant-dernier budget du ministre des Finances Raymond Bachand (celui de 2011-2012), la prévision de dépenses au service de la dette avait été surestimée de 312 millions. (Le service de la dette a quand même coûté 7,45 milliards, cette année-là.)

Ce n'était pas un mauvais calcul du ministère. Il ne pouvait pas prévoir que les taux d'intérêt, déjà très faibles, allaient encore diminuer.

Dans le budget de 2012-2013, déposé en mars, le ministère prévoyait ne pas pouvoir compter sur un deuxième coup de chance d'affilée. Le budget prévoit donc que le service de la dette coûtera cette année 8,24 milliards, soit 10,5% de plus qu'en 2012-2012. Il représente désormais 11,6% de l'ensemble des dépenses.

Il y a pourtant haute probabilité de rebelote pour le ministre, car les taux d'intérêt ont continué de diminuer depuis un an.

Les taux consentis par le Québec pour financer sa dette évoluent en fonction des taux d'intérêt sur les obligations du gouvernement du Canada. Les taux du Québec correspondent au taux canadien plus un écart qui peut être de 95 à 130 centièmes ces temps-ci pour une obligation de 30 ans, selon le degré d'aversion des prêteurs pour le risque. Les taux du Québec sont légèrement plus élevés que ceux de l'Ontario et c'est cet écart qui s'est élargi cette semaine.

Ainsi, au printemps, alors que s'exacerbaient la crise européenne et l'instabilité sociale générée par les carrés rouges et le bruit des casseroles, l'écart entre les obligations du Québec et celles du Canada venant à échéance est grimpé jusqu'à 120 centièmes. Depuis l'été, il s'est refermé et se rapproche des 110 centièmes.

Pour des échéances plus brèves, les écarts se sont aussi resserrés.

Mais ce qui compte avant tout, bisbille à Québec ou pas, c'est l'évolution des taux d'intérêt des obligations canadiennes.

Il y a deux ans, les taux des 10 ans et des 30 ans étaient de 3,33% et de 2,74%. L'an dernier ils étaient plutôt de 2,20% et de 2,83%. Cette baisse considérable sur les 10 ans a plus que compensé la légère hausse sur les 30 ans et permis les grandes économies au service de la dette.

Hier, les taux des 10 ans et des 30 ans avaient encore diminué: 1,76% et 2,34%.

S'il procède avec diligence pour profiter de cette fenêtre exceptionnellement avantageuse, Québec pourra à nouveau réaliser des économies sur son service de la dette. D'ici au 31 mars, il doit lever encore plusieurs milliards.

Plus le ministre sera crédible, plus grandes seront les économies dont il a le plus grand besoin.

La prochaine échéance d'emprunt du Québec : 2,3 milliards

Le plus récent taux payé par Québec (10 ans) : 2,991%