Le Loews Hôtel Vogue a beau détenir une cote cinq étoiles, sa façade n'est plus dans le coup. Les marquises vert forêt, héritage direct des années 80, trahissent de plus en plus l'âge du chic établissement.

Pour renverser la vapeur, les propriétaires de l'hôtel ont entamé ces derniers mois un vaste programme de rénovations de 8 millions de dollars. Quelque 5 millions ont été injectés pour moderniser les chambres et salles de bains, et 3 millions serviront à changer le lobby et la façade dans les prochaines semaines. Le vert forêt sera bientôt chose du passé.

«On avait besoin de réactualiser tout le produit, admet Éric Hamel, assistant-directeur général. On a écouté nos clients et on a fait un programme d'investissement assez important pour s'assurer qu'ils soient satisfaits.»

Cette rénovation majeure ne saurait tomber plus à point pour le Vogue. Car la concurrence s'annonce de plus en plus féroce dans ses environs immédiats -comme dans l'industrie hôtellière montréalaise dans son ensemble.

Il y a quelques semaines, un promoteur a annoncé la construction d'un mégaprojet immobilier, en face du Vogue, qui inclura un hôtel flambant neuf en remplacement de l'Hôtel de la Montagne. Puis, en mai, le Ritz Carlton voisin a rouvert ses portes après une longue rénovation de 200 millions de dollars.

«C'est sûr et certain que dans notre quartier à nous, il faut se positionner, et c'est probablement un fait aussi qui a motivé l'investissement», indique Éric Hamel.

Boom de rénos

Le secteur hôtelier s'est transformé en profondeur à Montréal depuis le milieu des années 2000. Dix-sept nouveaux établissements ont ouvert leurs portes pendant cette période, ajoutant 3000 chambres dans la région métropolitaine. Les investissements ont totalisé plus de 300 millions.

«C'était le plus gros boom hôtelier au Canada, rappelle Pierre Bellerose, vice-président de l'organisme Tourisme Montréal. Je dirais que le boom de construction d'hôtels a amené par la suite un boom de rénovations.»

Pour faire belle figure aux côtés d'établissements flambant neufs, comme le Westin Vieux-Montréal, le Crystal de la Montagne et le Hilton Garden Inn de la rue Sherbrooke, les hôtels existants se sont mis à dépenser des millions en travaux de toutes sortes. Une course à la modernisation encore plus apparente depuis environ an, avec la multiplication d'annonces de la part des groupes hôteliers.

L'Omni Mont-Royal a par exemple annoncé ce printemps un programme de 20 millions pour rénover ses 299 chambres, sa façade et son hall. Le Sheraton du centre-ville a pour sa part exécuté des travaux de 40 millions pour remettre à jour ses aires communes et ses 825 chambres. Plusieurs autres hôtels, comme le Delta et le Fairmont Reine Elizabeth, ont aussi rafraîchi leurs décors dans les récentes années.

«Le parc hôtelier a bougé, il y a de nouveaux hôtels, et tout le monde se met à faire des rénovations plus importantes, observe Gilles Larivière, président de la firme de consultants Horwath-HTL. Tu n'as plus le choix: si les voisins peinturent leur bungalow et mettent des fleurs en avant de la maison et que tu es le seul de la rue qui ne le fait pas, ça ne va plus.»

La vague actuelle de rénovation apparaît d'autant plus forte que bien des travaux ont été mis sur la glace en 2008 et 2009, au plus fort de la crise économique. Le taux d'occupation des hôtels montréalais était alors tombé 60,5%, avant de remonter jusqu'à 67,2% en 2011, une année considérée comme une très bonne.

«Les hôteliers ont tendance à essayer d'étirer au maximum quand les périodes sont difficiles, car on enlève ça (les investissements) du chiffre d'affaires, indique Gilles Larivière. Et quand les niveaux d'occupation se rétablissent, comme ils l'ont fait depuis 2010, ils disposent d'un peu de fonds pour rénover la princesse.»

Le président d'Horwath-HTL précise que l'industrie hôtelière privilégie le remplacement des «soft goods» (rideaux tapis, tentures, recouvrement de fauteuils, couleurs, papiers peints) tous les sept ans, tandis que les «hard goods» (le mobilier) durent plutôt jusqu'à 10 ans.