Des clients inquiets appellent chez les voyagistes actifs à Montréal. Un agent qui reçoit des groupes européens confie que si les manifestations se poursuivent cet été, il va suggérer aux groupes qui viennent spécifiquement à Montréal pour le Festival de jazz, les FrancoFolies ou le Festival Juste pour rire de passer leur tour cette année.

«Si les manifestations nocturnes continuent, je vais dire à mon client qui me pose la question d'éviter de venir aux festivals parce que nous sommes responsables [de leur sécurité] et on risque de se faire demander un remboursement du voyage et on ne veut pas faire ça», dit Claude Fettaya, directeur général de Géotours, un agent réceptif auprès de groupes européeens.

Pour le moment, Géotours n'a pas eu à annuler le voyage de quiconque, mais M. Fettaya a hâte que le calme revienne avant le début de la saison haute, soit avant le week-end du Grand Prix de Formule 1 à partir du 8 juin.

«À ceux qui nous posent des questions, on cherche à minimiser le problème en leur disant que le problème se concentre dans certaines rues ou certains quartiers, mais que ça ne les empêche pas de visiter le Québec ou le Canada», poursuit M. Fattaya.

Passer la nuit à Tremblant

De plus, si jamais les choses dégénèrent, Géotours réorganisera la planification de ses voyages pour faire visiter Montréal le jour pour ensuite quitter la ville en fin de journée en faisant dévier le groupe dans les Laurentides pour la nuit. «C'est notre plan B», confie M. Fattaya.

À ce propos, Mayra Castro, propriétaire de Dominion Tours Canada, qui accueille environ de 1000 à 1500 touristes hispanophones par année, a reçu mercredi un appel d'Intrawest qui s'informait si sa clientèle voulait passer la nuit à Tremblant pour plus de sécurité.

«On a énormément de questions», reconnaît pour sa part Louise Hébert, propriétaire de Guidatours, agence qui fournit des guides touristiques aux voyagistes actifs à Montréal. À ce temps-ci de l'année, elle guide surtout des groupes scolaires en provenance de l'Ontario et à l'occasion des États-Unis. Curieusement, les deux seules annulations en lien avec le désordre social proviennent de groupes du Québec: un groupe de l'âge d'or et un groupe d'écoliers. «Ils ne voulaient pas venir à Montréal», dit Mme Hébert.

Inquiétudes croissantes

Jonview, important agent réceptif de la famille Transat qui fait visiter le Canada à 240 000 Européens par année, doit aussi répondre aux questions de la clientèle. «Des questions sont posées, mais, pour l'instant, ce n'est pas une préoccupation majeure», assure Debbie Cabana, porte-parole chez Transat.

Néanmoins, les manifestations étudiantes sont suivies de très près par Jonview, car l'agence doit informer ses fournisseurs, la firme d'autocars nolisés pour les tours de ville par exemple, des délais ou des rues bloquées le long de sa route.

«Un important voyagiste nous a appelés en début de semaine et est réticent à venir au Québec en raison de ce qu'il voit dans les médias, dit au téléphone Magalie, chez Go West, qui vend le Canada et les États-Unis à une clientèle européenne. Il me demande si c'est bien sécuritaire, s'il ne devait pas repousser le voyage à Montréal. Oui, ça commence à créer des inquiétudes.»

Par contre, c'est business as usual chez Global Express Tours, agence du Massachusetts qui se décrit sur l'internet comme le voyagiste à destination de Montréal numéro un en Nouvelle-Angleterre. «Vous me dites que les étudiants sont dans la rue pour protester contre la hausse des droits de scolarité? demande au téléphone, John Bal, incrédule. Qu'ils viennent aux États-Unis, ils verront ce que c'est, des droits de scolarité exorbitants», a-t-il ajouté.

Dans sa publicité, Global fait valoir les charmes de la vie nocturne à Montréal auprès d'une clientèle formée principalement de jeunes adultes. M. Bal fait voyager environ 3000 personnes à Montréal par année. «J'ai rempli deux autobus pour samedi», dit-il.