Les pilotes d'Air Canada et d'Air Transat ont accusé Sunwing de faire de la concurrence déloyale aux voyagistes canadiens en ayant recours à des avions et à des pilotes étrangers pendant la saison d'hiver.

En procédant ainsi, Sunwing n'a pas besoin de payer les salaires, les avantages sociaux et les frais substantiels de formation des équipages que doivent assumer les autres transporteurs, ont soutenu les pilotes. C'est la multinationale britannique TUI, qui détient une participation de 49% dans Sunwing, qui assume ces charges.

«C'est une forme de dumping», a affirmé Sylvain Aubin, président du syndicat des pilotes d'Air Transat, dans une entrevue téléphonique avec La Presse Affaires.

Dans une entrevue plus tôt cette semaine, le directeur général de Sunwing au Québec, Sam Char, a fait valoir en entrevue que la marge bénéficiaire de son entreprise avoisinait les 6%, alors que celle des autres voyagistes n'atteignait pas 2%. Cette affirmation a fait réagir. Une douzaine de pilotes d'Air Transat et d'Air Canada ont adressé à La Presse Affaires de longs courriels détaillés pour condamner les pratiques de Sunwing.

«Si Sunwing devait trouver une utilisation à ses appareils 12 mois par année, comme Air Canada, Air Transat, WestJet et les autres, sa marge de profit baisserait», a affirmé Jean-Marc Bélanger, porte-parole de l'Association des pilotes d'Air Canada.

La flotte permanente de Sunwing ne compte que huit appareils. Pendant la saison haute, soit la saison d'hiver, elle utilise une vingtaine d'appareils de TUI, sous-utilisés en Europe parce qu'il s'agit alors d'une saison basse. Sunwing, qui emploie directement 150 pilotes au Canada, a recours à des pilotes étrangers additionnels.

Selon les pilotes d'Air Transat et d'Air Canada, ils étaient près de 200 pilotes étrangers, surtout des Allemands, au cours de l'hiver qui vient de se terminer, un nombre qui pourrait passer à 300 au cours de l'hiver qui s'en vient.

Ce sont des emplois qui échappent aux pilotes canadiens. En outre, les pilotes étrangers ne paient pas d'impôts au Canada, a noté M. Aubin.

«Sunwing profite d'une échappatoire dans la réglementation», a-t-il lancé.

Les pilotes se préoccupent des pratiques de Sunwing depuis 2009, mais ils ont multiplié les efforts récemment, notamment avec une pétition destinée au ministre fédéral de la Citoyenneté et de l'Immigration, Jason Kenney.

Un programme d'échange fédéral permet l'emploi de travailleurs étrangers temporaires s'il y a réciprocité, c'est-à-dire si des travailleurs canadiens peuvent occuper des emplois similaires à l'étranger.

Les pilotes d'Air Canada et d'Air Transat soutiennent toutefois que peu de pilotes de Sunwing auront l'occasion d'aller travailleur en Europe pendant l'été, soit environ 80.

Dans la pétition, les pilotes soutiennent que Sunwing trompe le ministère canadien de la Citoyenneté et de l'Immigration en faisant valoir qu'elle n'arrive pas à trouver un nombre suffisant de pilotes possédant une certification pour l'appareil Boeing 737.

M. Aubin a expliqué que c'était normalement le transporteur qui payait la formation d'un pilote pour un appareil particulier, une formation qui peut coûter jusqu'à 50 000$ et qui peut prendre jusqu'à deux mois. Il est donc effectivement difficile de trouver sur le marché un pilote détenant déjà une certification sur un type spécifique d'appareil.

Le ministère de la Citoyenneté et de l'Immigration n'a pas commenté spécifiquement le cas de Sunwing. Un porte-parole a cependant fait savoir à La Presse Affaires, par voie de courriel, que le ministère travaillait en collaboration avec Transport Canada, l'Agence canadienne des transports et le ministère des Ressources humaines et du Développement des compétences «pour s'assurer qu'il n'y ait pas de déséquilibre ou de compétition déloyale sur le marché du travail».

M. Char n'a pas voulu discuter des pilotes étrangers hier, préférant envoyer la question au président de FlySunWing. En fin d'après-midi, celui-ci n'avait toujours pas rappelé La Presse Affaires.