La Caisse de dépôt et placement pourrait subir les contrecoups de la crise financière qui secoue l'Europe, prévient le président de l'institution, Michael Sabia.

> Allocution de Michael Sabia: «La Caisse face à un monde en pleine turbulence»

Alors qu'il prenait la parole devant un parterre de gens d'affaires de Québec, mercredi, le grand patron de la Caisse s'est montré fort préoccupé par les conséquences de l'endettement hors de contrôle des pays de la zone euro, dont la Grèce, rendant chaque jour plus fragile le système bancaire, à court de liquidités.

Si un coup de barre n'est pas donné à très court terme, il a dit craindre l'impact de cette crise sur l'économie québécoise et sur le rendement de la Caisse, qui ne serait certainement pas épargnée.

«Est-ce que la Caisse est immunisée contre une situation extrême et difficile sur les marchés? La réponse est: il est impossible que la Caisse soit immunisée, ça c'est impossible», a-t-il tranché, en point de presse.

La situation est sérieuse, «excessivement turbulente», et justifie une riposte urgente, selon lui. Car le risque de contagion est bien réel.

L'issue à la crise réside, selon lui, dans la réponse politique que devront fournir les gouvernements européens, appelés à renforcer le système financier des banques en acceptant de recapitaliser les plus mal en point d'entre elles.

Il préconise également que la situation particulière de la Grèce fasse en sorte qu'un «mur» soit érigé entre ce pays et le reste de l'Europe.

Comme le ministre fédéral des Finances, Jim Flaherty, M. Sabia est aussi d'avis que les pays de la zone euro doivent renflouer substantiellement le Fonds européen de stabilité financière (FESF) pour sauver les banques de la déroute.

«Quand une institution financière est en trouble, tout le monde est en trouble», croit-il.

Si la réaction de l'Europe est suffisamment musclée et qu'elle survient très rapidement, on pourra espérer éviter une récession mondiale ou de voir l'économie québécoise encaisser un impact majeur, selon lui.

«C'est important qu'ils prennent des décisions, et rapidement», selon lui, car «si cela prend des mois et des mois» avant de réagir, l'économie québécoise pourrait bien alors devoir absorber le choc et fonctionner au ralenti.

Dans ce contexte explosif, les leaders politiques européens doivent faire preuve de courage, a-t-il ajouté.

Aux gens d'affaires, M. Sabia a malgré tout livré un message rassurant, faisant valoir que sous sa gouverne la Caisse s'était donnée depuis deux ans des bases solides pour assurer aux Québécois un rendement stable, malgré les turbulences de l'économie.

Tel un mantra, le mot stabilité est revenu à maintes reprises dans sa bouche durant son allocution.

La crise actuelle pourrait même avoir de bons côtés pour la Caisse et fournir des possibilités d'investissement intéressantes où placer l'argent des Québécois.

Au moment où le gouvernement fédéral annonçait la construction d'un nouveau pont à Montréal, M. Sabia n'a pas exclu entrevoir une participation de la Caisse.

Investir dans les infrastructures, ici comme à l'étranger, est une valeur sûre, avait-il plaidé plus tôt, durant son allocution. La demande en infrastructures est énorme à l'échelle mondiale, dans les pays émergents et dans les pays développés.

À travers le monde, l'OCDE prévoit des investissements globaux en infrastructures de 40 000 milliards de dollars au cours des 20 prochaines années.

Toujours soucieux d'atteindre son objectif de «stabilité», M. Sabia a dit que la Caisse devait réduire le nombre de sociétés où elle investit, tout cela dans le but de «livrer un rendement plus stable». Actuellement, la Caisse détient des investissements boursiers dans plus de 500 sociétés. Elle sera donc plus sélective à l'avenir.

Pour le premier semestre de 2011, la Caisse de dépôt a enregistré un rendement de 3,6%, soit une performance semblable à celle du portefeuille de référence.

Au 30 juin, son actif net atteignait 157,9 milliards au 30 juin, en hausse de 6,2 milliards par rapport au 31 décembre 2010.