La Caisse de dépôt et placement du Québec aura mis deux ans et demi pour retrouver la valeur de son actif net de 2007, grâce à de bons rendements et aux contributions nettes de ses déposants. Toutefois, elle s'inquiète vivement du virage nettement négatif emprunté par les marchés au cours des dernières semaines.

Pour les six premiers mois de l'année, la Caisse a dégagé un rendement de 3,6%, soit 5,3 milliards de dollars. Si on ajoute à cette somme les 900 millions de nouveaux dépôts, son actif net s'élevait à 157,9 milliards au 30 juin. C'est 2,5 milliards de plus qu'au 31 décembre 2007, avant la débâcle de 2008.

Dépasser le niveau d'actif de 2007 ne signifie pas toutefois que les pertes abyssales de 2008 soient épongées. En fait foi l'augmentation de 9,9% à 10,8% entre 2012 et 2017 des cotisations au Régime des rentes du Québec, deuxième déposant en importance de la Caisse.

La direction actuelle de la Caisse n'a d'ailleurs pas célébré ce nouveau sommet, se concentrant plutôt sur sa performance récente.

«Ce sont des résultats solides, conformes aux attentes des déposants», a soutenu en appel conférence le président et chef de la direction de la Caisse Michael Sabia.

Par rapport à son portefeuille de référence dont elle a épousé de près la pondération au premier semestre, la Caisse réalise un rendement inférieur de un dixième de point. Sur un horizon de deux ans, qui correspond à l'entrée en fonction de la nouvelle direction, elle le supplante toutefois nettement (14% contre 11,3% sur une base annualisée).

Le rendement des six premiers mois a été assuré par son portefeuille de revenus fixes constitué d'obligations et de dette immobilière (2,9%), par ses placements sensibles à l'inflation tels les infrastructures et l'immobilier (5,3%) et par les actions cotées et non cotées en Bourse (3,0).

Même si la Caisse est toujours réticente à se comparer à ses pairs, son rendement de 3,6% la place dans le premier quartile, quelle que soit l'échantillon retenu. Ainsi, le rendement médian de celui de RBC Dexia, auquel M. Sabia a fait allusion, a été de 2,2%.

De janvier à juin, la Caisse a poursuivi son repositionnement sur ses métiers de base en se départant d'actifs immobiliers à l'étranger au prix fort et en diminuant encore l'effet de levier qui lui avait fait si mal en 2008.

Pour l'avenir immédiat, la Caisse a révisé à la baisse son scénario de croissance qu'elle place aux environs de 2% pour les économies occidentales, mais de 6% à 8% pour les pays émergents. Une récession n'est pas écartée, mais ce n'est pas le scénario qu'elle juge aujourd'hui le plus probable.

Selon M. Sabia, la volatilité et l'inquiétude perceptibles sur les marchés reflètent une crise de confiance qui se nourrit de trois causes: la dette souveraine en Europe et aux États-Unis et celle des ménages nord-américains, l'incapacité des gouvernements américain et européens à faire preuve de leadership dans le calibrage entre les stimuli à court terme et la maîtrise des finances publiques à moyen terme, et, avant tout, à la croissance anémique en Occident qui pâtit des deux situations précédentes.

Deux éléments peuvent stimuler la croissance dans le contexte actuel: la résilience des pays émergents et les investissements productifs des entreprises.

«Dans un tel environnement, prudence et agilité sont essentielles, a-t-il martelé. Nous suivons la situation de très près. La Caisse est dans une meilleure position pour naviguer dans cet environnement difficile» qu'en 2008, a-t-il soutenu.

À ses yeux, l'économie mondiale est aujourd'hui constituée de deux grands blocs: d'une part les États-Unis et l'Europe, d'autre part les pays émergents.

Entre les deux, il y a quelques pays comme le Canada et l'Australie qui peuvent tirer profit du dynamisme des économies émergentes, grandes consommatrices de ressources naturelles.

«Le Canada et le Québec sont bien positionnés face à la turbulence actuelle», soutient M. Sabia.

Faire preuve de prudence ne signifie pas laisser passer de belles opportunités. La Caisse envisage d'ailleurs d'investir en Amérique latine et d'accompagner de grandes sociétés québécoises dans leur expansion internationale.