Les habitudes de consommation de vin des Québécois ont évolué depuis 10 ans, mais ça ne paraît guère quand on regarde les bouteilles disponibles au dépanneur près de chez soi. Les mains liées par la réglementation stricte à laquelle ils sont assujettis, les épiciers et propriétaires de dépanneur ont vu leur part de marché s'éroder depuis 2002.

Aujourd'hui, le «vin de dépanneur» ne représente plus que 11% des ventes totales d'alcool en dollars et 20% en volume, dans les deux cas un recul de 3 points de pourcentage en une décennie, constate-t-on dans le dernier rapport annuel de la Société des alcools du Québec. La SAQ rapporte les ventes dans ses deux réseaux: ses succursales et le réseau des grossistes-épiciers.

Dans les épiceries et dépanneurs de la province, il s'est vendu pour 295,3 millionsde dollars en vin et autres boissons alcoolisées ou 37,7 millions de litres au cours de l'année terminée au 31 mars 2011. Les ventes en dollars et en volume progressent d'année en année, mais moins rapidement que les ventes dans les succursales de la SAQ. Le réseau des grossistes-épiciers a le monopole de la vente du vin embouteillé au Québec par des entreprises comme Maison des Futailles, Vincor et Geloso.

«On devrait donc pouvoir développer les deux secteurs, mais il semble que la priorité n'est pas mise sur le nôtre, dit Pierre-Alexandre Blouin, vice-président Affaires publiques de l'Association des détaillants en alimentation du Québec, qui regroupe 2000 détaillants propriétaires. On travaille avec les contraintes que l'on a et qui nuisent à l'amélioration de la catégorie. Par exemple, on n'a pas le droit d'identifier les cépages sur les produits», explique-t-il. Chardonnay, cabernet sauvignon, pinot noir sont des exemples de cépage.

Les limitations ne touchent pas uniquement la mise en marché. Les lourdeurs bureaucratiques sont telles qu'il est à peu près impossible pour les vignerons québécois de vendre leurs bouteilles dans les dépanneurs. «Prenez les épiceries fines comme il y en a partout, c'est évident que c'est un réseau qui nous intéresse», dit Léon Courville, propriétaire du vignoble Domaine Les Brome, de Lac-Brome.

Réplique de la SAQ

La SAQ réplique que des modifications aux dispositions entourant la vente de vin dans les épiceries et dépanneurs nécessiteraient une modification aux accords de l'Organisation mondiale du commerce. «Il n'y a pas de volonté de modifier cette donne pour l'instant d'aucune façon», dit Isabelle Merizzi, directrice des affaires publiques, de la SAQ.

Dans la dernière année, la société d'État a tout de même étendu au réseau des grossistes-épiciers son populaire système de pastilles de goût. «Elles suscitent un intérêt très grand. Le consommateur retrouve la même image qu'à la SAQ, il est capable de retrouver en épicerie des vins au goût similaire à la pastille qu'il préfère en succursale», dit Mme Merizzi.

Au sujet de la vente de produits québécois, la porte-parole reconnaît que le vin québécois a pris un envol. Les ventes de vins locaux sont passées à 2 ou 3 millions en 2010-2011, alors qu'elles se chiffraient à quelques centaines de milliers de dollars en 2002.

La SAQ a augmenté la visibilité des produits québécois au printemps 2010 dans environ 175 succursales. «Les ventes ont connu un essor. L'initiative sera étendue dans l'ensemble de nos succursales.»

Année 2010-2011 (var. 1 an)

Revenus : 2,66 milliards ("4,4%)

Bénéfice net : 914,7 millions ("5,4%)

Dividende: 914,7 millions ("5,4%)