L'explosion de la valeur des propriétés au nouveau rôle d'évaluation foncière a fait grogner bien des Montréalais au cours des derniers mois, mais la Ville n'est pas inondée de demandes de révision pour autant.

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À quatre semaines de la date limite pour contester son évaluation, les autorités municipales ont reçu 2143 demandes, a appris La Presse Affaires. Quand le dernier rôle a été publié, en 2007, la Ville en avait reçu 5320 au total.

Le rythme des requêtes en contestation est un peu plus élevé qu'en 2007, mais la marge d'écart n'a «rien d'exceptionnel», a fait valoir Patricia Lowe, porte-parole de la Ville de Montréal. Elle a été incapable d'indiquer la différence exacte en date d'hier.

Les Montréalais insatisfaits ont jusqu'au 2 mai pour contester la valeur accordée à leur résidence par la Ville. Cette évaluation a une importance cruciale, puisqu'elle sert à établir l'impôt foncier à payer jusqu'en 2013.

La hausse moyenne est de 23,5% depuis le dernier rôle de 2007, mais plusieurs citoyens ont vu leurs évaluations bondir davantage, selon le degré d'attractivité de leur quartier. Près de 6000 résidants du Plateau-Mont-Royal, arrondissement très prisé, ont signé une pétition pour exprimer leur mécontentement face à des augmentations jugées trop élevées.

Évaluateurs occupés

Les proprios sont nombreux à être scandalisés par le nouveau rôle, au point de mandater des experts pour préparer leur défense. «Je vous dirais que j'ai facilement reçu le double de demandes en analyse préliminaire par rapport à 2007, pour savoir si ça vaut la peine de contester ou pas», a indiqué Pierre Goudreau, évaluateur agréé chez Eximmo.

L'expert dit avoir bouclé une centaine de dossiers depuis le dépôt du nouveau rôle par la Ville l'automne dernier. «J'ai eu de tout, de la simple maison unifamiliale jusqu'à la tour de bureaux, en passant par les centres commerciaux, les bâtisses industrielles, les terrains...»

Or, dans plus de la moitié des cas, Pierre Goudreau a conclu que ses clients n'avaient pas d'arguments pour contester leur nouvelle évaluation foncière. Il rappelle que les prix de l'immobilier ont connu une croissance presque ininterrompue dans l'île de Montréal entre juillet 2005 et juillet 2009 (les deux mois de référence pour créer le rôle foncier), ce qui a nécessairement fait bondir les valeurs attribuées par la Ville.

Le prix moyen pondéré des propriétés résidentielles, toutes catégories confondues, est passé de 274 075$ à 333 560$ pendant cette période dans l'île, selon les données de la Chambre immobilière du Grand Montréal. Une hausse de 22%.

«J'ai un propriétaire qui m'a donné 18 propriétés à regarder, on a fait des demandes de révision seulement dans cinq cas, a illustré M. Goudreau. Un autre client en avait une dizaine, on en a contesté deux.»

En somme, la frustration ne constitue pas un motif suffisant pour faire une demande de révision. D'autant plus que la contestation implique des coûts assez importants: environ 500$ pour avoir recours à un évaluateur (ce qui n'est pas obligatoire pour présenter un dossier), sans compter les frais administratifs de 40$ à 1000$ pour déposer sa requête à la Ville.

Aussi, la différence entre le rôle d'évaluation et la valeur marchande doit être assez importante pour que cela vaille la peine de contester, souligne Pierre Goudreau. «Tout écart en dessous de 10%, on perd un peu notre temps.»

La Ville de Montréal a prolongé d'une journée la période de contestation, puisque la date butoir du 1er mai tombait un dimanche. Au dernier rôle de 2007, une proportion de 1,2% des propriétaires de l'île - 5320 - ont fait une demande de révision.