Le projet fédéral de commission unique de valeurs mobilières tiraille le milieu de la finance à Montréal, alors que se prépare une audience décisive en Cour suprême prévue pour la mi-avril.

Cette fois, c'est un entrepreneur financier de renom, Jean-Guy Desjardins, président du conseil de Fiera Sceptre, qui gère plus de 30 milliards, qui se prononce en faveur du projet fédéral de commission unique.

«Je suis en faveur d'une commission nationale qui aurait des avantages d'efficacité et d'uniformité réglementaire tout en ayant une représentation provinciale qui reconnaît les différences entre les provinces. En ce sens, le projet fédéral m'apparaît un compromis acceptable, un pas vers l'avant», a indiqué M. Desjardins à La Presse Affaires, hier, après l'assemblée des actionnaires de Fiera Sceptre.

Avec cette opinion, Jean-Guy Desjardins s'inscrit en faux contre l'opposition au projet fédéral de commission unique que mènent les gouvernements du Québec et de l'Alberta, notamment.

Cette opposition a été entérinée par des financiers influents à Montréal, dont Monique Leroux, présidente du Mouvement Desjardins, et Michael Sabia, président et chef de la direction de la Caisse de dépôt et placement.

En contrepartie, les présidents de deux banques québécoises, Louis Vachon de la Nationale et Réjean Robitaille de la Laurentienne, se sont abstenus de prendre position jusqu'à maintenant.

En fait, ils ne se sont pas dissociés de l'appui inconditionnel au projet fédéral manifesté par leur principal regroupement d'affaires - l'Association des banquiers canadiens (ABC).

Cette association est une partenaire de premier plan du gouvernement fédéral dans le cadre de ses représentations sur son projet de commission unique devant les tribunaux d'importance au Canada, à savoir la Cour suprême, où l'audience est prévue dans un mois, ainsi que la Cour d'appel du Québec, en instance de décision, et la Cour d'appel de l'Alberta, qui a récemment déclaré le projet fédéral en contravention de la Constitution canadienne.

Notoriété

Quant à Jean-Guy Desjardins, il doit sa notoriété à ses talents d'entrepreneur financier qui, depuis 30 ans, ont été à l'origine de firmes comme TAL, Elantis, Fiera Capital et, depuis peu, Fiera Sceptre.

Après l'acquisition de Sceptre Investments à Toronto l'an dernier, Fiera Sceptre se situe maintenant parmi les cinq plus importantes firmes indépendantes de gestion de placements au Canada.

À l'automne 2008, M. Desjardins a été parmi les candidats à la présidence de la Caisse de dépôt et placement, en remplacement du démissionnaire Henri-Paul Rousseau. Il avait auparavant siégé pendant six ans au conseil d'administration de la Banque du Canada.

C'est d'ailleurs lors de ce passage à la plus haute instance financière du pays qu'il admet aujourd'hui avoir été sensibilisé à la pertinence d'établir une commission nationale de valeurs mobilières.

«La Banque du Canada avait déjà réalisé diverses analyses en ce sens, qui démontraient l'avantage d'une telle commission pour le Canada», a-t-il souligné hier en entretien.

Selon Jean-Guy Desjardins, le projet fédéral de commission unique rehaussera l'efficacité de réglementation et de surveillance des marchés financiers au Canada. Mais aussi, il améliorera leur arrimage avec ce qui se passe ailleurs dans le monde.

«Je ne m'attends pas à ce que l'on se retrouve au Canada avec une commission nationale de style américain (la SEC). Néanmoins, l'absence d'une commission plus nationale au Canada affecte l'image que l'on projette à l'étranger en matière de réglementation financière», a-t-il dit.