Quelles victimes de fraude doivent être indemnisées par l'Autorité des marchés financiers? Au lendemain de la décision de l'AMF de porter en appel une décision attribuant 7 millions de dollars à 138 investisseurs de Norbourg, le ministre des Finances, Raymond Bachand, veut un débat. Et il se range dans le camp de l'AMF.

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«Le temps est mûr pour que l'Autorité des marchés financiers fasse un débat public au printemps, convoque les gens et qu'on ait un débat public sur l'indemnisation des gens qui se font frauder», a dit le ministre Bachand hier en point de presse.

Le ministre Bachand estime que le juge Bernard Godbout, de la Cour supérieure, a commis «des erreurs de droit majeures» en ordonnant à l'AMF d'indemniser les investisseurs des fonds Perfolio par l'entreprise de son fonds d'indemnisation. «Ce jugement comporte des erreurs de droit majeures qui nécessiteraient de modifier les lois du Québec, ce qu'on a pas le temps de faire aujourd'hui. Il renverse le fardeau de la preuve. La Cour d'appel décidera, mais le jugement va beaucoup trop loin à notre avis. Avec toute la sympathie que nous pouvons avoir pour ces 138 victimes, notre rôle est de protéger l'État et le bien public. En raison des problèmes juridiques majeurs que ce jugement crée, nous devons aller en appel», dit le ministre Bachand, qui n'a pas été consulté par l'AMF sur la décision de porter la cause en appel.

L'avocat des victimes de Norbourg s'étonne des déclarations du ministre Bachand sur les «erreurs majeures de droit» alors que la cause est toujours devant les tribunaux. «Je suis étonné de l'intervention d'un ministre senior du gouvernement dans le cadre d'une instance judiciaire en cours», dit Me Marc-André Gravel, qui représente les 138 investisseurs des fonds Perfolio.

Le Parti québécois estime que le ministre Bachand n'a pas outrepassé son devoir ministériel de réserve en commentant publiquement une décision judiciaire concernant l'AMF, dont il est le ministre responsable. «Le ministre (Bachand) est le patron de l'AMF. Le gouvernement a le droit de commenter sa décision», dit François Rebello, député péquiste de Le Prairie.

Dans le dossier de l'indemnisation des victimes de Norbourg, le Parti québécois est en désaccord avec le gouvernement Charest. Selon le PQ, l'AMF n'aurait pas dû porter la décision de la Cour supérieure en appel. «Quand je lis la décision du juge, je suis d'accord avec lui et je trouve qu'il y va avec le gros bon sens, dit le député François Rebello. S'il y a des changements à faire dans la loi, ce n'est sûrement pas pour confirmer que l'AMF ne devrait pas indemniser des investisseurs en jouant sur les structures.»