Le propriétaire de la défunte agence de sécurité BCIA, Luigi Coretti, est en faillite. Ses créanciers ont rejeté mardi une proposition de règlement à l'amiable qui prévoyait le remboursement d'une part infime de ses dettes de plus de 3 millions.

Le 5 novembre, M. Coretti a présenté à ses créanciers une offre qui lui aurait permis d'éviter une troisième faillite personnelle en 20 ans. Il proposait de leur rembourser 150 000$ sur cinq ans. Il comptait également leur verser 70% du produit d'une poursuite en dommages «à être intentée dans les six mois».

Or, il n'a fourni aucun détail sur cette action en justice dans les documents soumis aux créanciers. Et il n'en a pas dit davantage lors d'une assemblée tenue à la Place Ville-Marie mardi, selon des créanciers qui y assistaient.

Selon une personne qui a assisté à la rencontre de mardi, M. Coretti s'est levé de son siège au terme du vote des créanciers. Il a quitté la salle et il n'est jamais revenu. L'assemblée a été dissoute peu après.

M. Coretti s'est refusé à tout commentaire à sa sortie de la rencontre, de laquelle le représentant de La Presse avait été expulsé.

Steve Whitter, un avocat qui travaillait pour BCIA, affirme que M. Coretti lui doit des congés de vacances impayés. Selon lui, la décision des créanciers était prévisible, car rares étaient ceux qui jugeaient l'offre suffisante.

«C'est ce que la majorité des créanciers ont dit, que la proposition ne faisait pas leur affaire», a résumé M. Whitter.

Le syndic André Allard, qui administrait le dossier jusqu'à mardi, avait d'ailleurs émis de «sérieux doutes» sur la possibilité que les tribunaux avalisent la proposition de M. Coretti.

«Vu le manque d'information sur la poursuite à être intentée et vu le montant du dividende à être offert aux créanciers, le syndic n'est pas en mesure d'émettre une recommandation sur l'acceptation de la proposition», a-t-il écrit dans un note remise aux créanciers.

«Le syndic va faire son travail statutaire, c'est-à-dire rencontrer le failli, prendre possession de ses biens et les liquider pour le bénéfice des créanciers», a indiqué Gilles Gagnon, de PricewaterhouseCoopers, qui a été désigné syndic au terme de la rencontre de mardi.

D'après sa proposition aux créanciers, Luigi Coretti possède deux REER totalisant 119 000$, ainsi que des meubles et des effets personnels qui valent 6000$. La liste des actifs ne mentionne aucune voiture, ni sa maison de Laval, qui a été saisie sur ordre des tribunaux en août dernier.

Parmi les créanciers de l'homme d'affaires, on compte la Caisse centrale Desjardins du Québec et la société MMV Financial, dont la Caisse de dépôt et placement est le deuxième actionnaire.

Luigi Coretti et sa firme BCIA se sont retrouvés au coeur de plusieurs controverses au cours des derniers mois. L'agence de sécurité a surveillé le quartier général du Service de police de la Ville de Montréal (SPVM) et deux autres bâtiments occupés par la force policière de 2006 à 2010 sans jamais signer un contrat en bonne et due forme.

BCIA a fait faillite en mai. Des enquêtes de La Presse ont révélé que M.

Coretti avait par deux fois invité à souper l'ancien chef du SPVM, Yvan Delorme, avant qu'il n'entre en fonction. Et d'anciens employés ont affirmé que l'entreprise a surveillé gratuitement la résidence de Frank Zampino, l'ex-bras droit du maire Gérald Tremblay.

La firme a provoqué une tempête à l'Assemblée nationale. Le ministre de la Famille Tony Tomassi a été expulsé du gouvernement Charest pour avoir utilisé une carte de crédit fournie par BCIA.

Fin septembre, deux entreprises qui ont financé M. Coretti, le Mouvement Desjardins et Investissement Québec, ont porté plainte à la Sûreté du Québec après avoir reçu un rapport juricomptable sur l'évolution des finances de BCIA.

- Avec la collaboration de Francis Vailles