À moins d'une reprise des pourparlers en présence de la conciliatrice affectée au dossier et des progrès dans les négociations, tout porte à croire qu'il y aura grève des travailleurs de la construction à compter de lundi, paralysant l'ensemble des activités, y compris sur les chantiers routiers.

Jeudi, patrons et syndicats sont intervenus sur la place publique même si en conciliation, ils avaient été invités à s'abstenir de parler aux médias.

D'abord, à Montréal, deux associations patronales de l'industrie ont lancé un appel aux syndicats afin qu'ils fassent montre de «bon sens», estimant «injustifié» le recours à la grève de la part des 146 000 travailleurs de l'industrie.

L'Association de la construction du Québec (ACQ) et l'Association provinciale des constructeurs d'habitations du Québec (APCHQ), représentant 80% de l'activité globale, ont qualifié de «totalement inconcevables» les demandes syndicales, compte tenu de la particularité de chaque secteur d'activité.

Mais, en réplique un peu plus tard, l'Alliance syndicale de la construction a semblé demeurer campée sur ses positions tout en se disant prête à rencontrer les employeurs jour et nuit s'il le faut d'ici le 30 août pour conclure une entente.

L'Alliance a dit mettre «tout en oeuvre» afin d'arriver à un règlement négocié pour éviter de recourir à la grève générale.

Mais elle a vivement déploré, par voie de communiqué, ne pas avoir eu une réponse de l'ACQ au sujet de l'offre de règlement global qu'elle a présentée aux employeurs mardi.

Cette offre, selon la partie syndicale, comprend notamment des propositions sur les salaires, les primes et les avantages sociaux.

Sur ce dernier point, l'Alliance syndicale se réjouit de l'accord obtenu sur les avantages sociaux. «C'est la preuve que des discussions franches sont le meilleur moyen de résoudre des différends. Les deux associations devraient s'en inspirer pour les clauses qui demeurent en suspens», ont indiqué les représentants de l'ensemble des ouvriers syndiqués dans le communiqué de presse.

Mais du côté patronal, on a tenu à mettre les pendules à l'heure.

Pour Éric Cherbaka, de l'APCHQ, les syndicats cherchent à uniformiser les conditions dans tous les secteurs de l'industrie (habitation, institutionnel, commercial et industriel) sans tenir compte des réalités de chacun.

Pour sa part, Lyne Marcoux, négociatrice en chef de l'ACQ, a invité l'Alliance syndicale à informer les travailleurs sur l'état des négociations alors que, selon elle, des progrès majeurs ont été réalisés sur des points en litige.

«C'est réglé à 90% dans les secteurs industriel, commercial et institutionnel. Des progrès importants ont été réalisés sur plusieurs points en litige et les salariés de la construction doivent savoir ce qui se dit à la table de négociation», a-t-elle martelé.

La partie patronale a tenu à souligner que, à son avis, de nombreux travailleurs ne veulent pas d'une grève. «Nous on veut une entente négociée. On envoie un dernier signal aux syndicats, un signal du bon sens», a ajouté celle qui négocie pour les employeurs.

Mais son collègue a toutefois reconnu qu'un conflit pointe à l'horizon.

«Si on ne se parle pas, inévitablement, on se dirige vers un conflit dès lundi», a-t-il dit.

En conséquence, il a rappelé les propos d'un dirigeant syndical. «Il avait dit que personne ne veut la grève et qu'il est dans l'intérêt de tous d'en arriver à une entente négociée», a repris M. Cherbaka.

«Tout le monde sera perdant advenant un conflit. Les entrepreneurs qui auront des retards, les gens qui attendent leur maison et même les travailleurs qui n'auront pas de revenus», a signalé le dirigeant de l'APCHQ.

Depuis la semaine dernière, des dizaines de chantiers de construction se sont vidés un peu partout au Québec, à la suite de pression de dirigeants syndicaux.

À ce sujet, M. Cherbaka a mentionné que des travailleurs n'ont pas eu le choix de quitter le chantier sur lequel ils travaillaient.

«Quand débarquent 40 ou 50 gars et que l'on t'ordonne de retourner à la maison, le salarié n'a pas le choix, alors qu'il a une famille et une maison à payer», a déploré le porte-parole patronal.

Malgré ces interventions, certains s'attendent à un retour à la table de négociations.