À voir les trottoirs dégarnis de Montréal l'hiver dernier, on pourrait croire que les stations de ski de la province ont passé une saison de misère. Or, il n'en est rien. À grands coups de canons à neige, aidés par la fièvre olympique et l'absence de grands froids, les centres de ski du Québec s'en sont en fait assez bien tiré.

«C'est le grand secret de cette année: tout le monde pense que les stations en ont bavé à cause du manque de neige naturelle. Alors qu'au fond, au chapitre du ski et des conditions, c'est probablement l'une des plus belles saisons qu'on ait eues au cours des dernières années», dit Alexis Boyer-Lafontaine, directeur des affaires publiques de l'Association des stations de ski du Québec.

Bon an, mal an, on compte entre 6 et 7 millions d'entrées dans les stations de ski de la province. Les statistiques de la saison qui vient tout juste de prendre fin ne sont pas encore comptabilisées, mais M. Boyer-Lafontaine est déjà convaincu que le chiffre de 6,168 millions d'entrées de l'an dernier sera facilement battu.

«On peut déjà présumer qu'on sera au-dessus de 6,5 millions de visiteurs. Est-ce qu'on atteindra le chiffre magique de 7 millions? Il est trop tôt pour le savoir», dit-il.

Le Massif de Charlevoix, où les derniers skieurs ont dévalé les pentes dimanche dernier, a déjà annoncé une saison record, avec une hausse des fréquentations de 13%. Il faut dire qu'avec 615 centimètres de neige au cours de l'hiver, la station a été particulièrement choyée.

Autre son de cloche à Tremblant, où Alain Brochu, vice-président aux ventes, marketing et communications, estime avoir connu un achalandage de 7% inférieur à la moyenne.

«C'est une saison qu'on pourrait qualifier de bonne. C'est sûr qu'elle a commencé tard - il n'a pas fait froid au début et on a ouvert trois semaines plus tard que d'ordinaire. Mais on s'est repris: du 4 au 24 décembre, on a fabriqué de la neige pendant 21 jours, 24 heures sur 24», dit M. Brochu.

Les Américains, qui comptent habituellement pour environ 30% des skieurs de Tremblant, se sont faits un peu plus discrets cette année, peut-être à cause des conditions économiques difficiles et de la force du dollar canadien.

À Mont-Saint-Sauveur International, qui exploite six stations dans les Laurentides, on explique que la période des Fêtes et surtout la relâche particulièrement ensoleillée ont attiré beaucoup de skieurs.

«Le problème, c'est entre les deux, dit Louis-Philippe Hébert, président et chef de la direction. Il n'y a pas eu de neige à Montréal, et les gens ne se sentaient pas à l'aise d'aller pratiquer des sports de glisse même si on avait de bonnes conditions ici.»

Montréal a en effet connu une séquence de 20 jours sans neige en plein coeur de l'hiver, du jamais vu.

«Mais l'Estrie et Charlevoix s'en sont très bien tirées du point de vue des précipitations», dit toutefois René Héroux, d'Environnement Canada.

Selon Alexis Boyer-Lafontaine, de l'Association des stations de ski, la saison a démarré en lion avec la vente d'environ 240 000 abonnements, plus que les quelque 234 000 de l'an dernier.

«C'est une tendance de fond dans l'industrie. Les formules d'abonnement de saison, à rabais ou non, fonctionnent bien au Québec», dit-il.

Selon lui, les prouesses des Érik Guay, Alexandre Bilodeau et autres Jasey-Jay Anderson pendant les Jeux olympiques de Vancouver ont aussi certainement incité les jeunes Québécois à aller tester leurs propres habiletés sur les pentes.

Selon M. Boyer-Lafontaine, la rentabilité des stations de ski du Québec demeure toutefois «fragile». Les chiffres les plus récents montrent que pendant l'excellente saison 2007-2008, 72% des stations québécoises ont dégagé des bénéfices, comparativement à seulement 42% un an auparavant. De plus, 35 des 40 stations dites «municipales» de la province sont «quasi systématiquement déficitaires», selon l'Association des stations de ski.