Face à un marché intérieur saturé et la menace d'une plus grande ouverture des frontières pour les produits agricoles, la coopérative laitière Agropur ne voit plus qu'une voie de croissance: l'expansion à l'étranger. Et comme les dirigeants parlent de doubler le chiffre d'affaires dans la prochaine décennie, il y a fort à parier qu'Agropur demeurera très active sur le marché des acquisitions.

Depuis 2008, Agropur a mis la main sur deux laiteries et deux entreprises fromagères dans le nord des États-Unis, si bien que les activités américaines du transformateur représenteront déjà 25% du chiffre d'affaires global. Agropur participe aussi depuis 2008 à la coentreprise argentine La Lacteo.

«Dans les prochaines années, nous prévoyons une implantation accrue aux États-Unis et en Amérique du Sud», a déclaré hier le chef de la direction d'Agropur, Pierre Claprood, pendant l'assemblée générale annuelle de la coopérative.

Les négociations sur une potentielle libéralisation des marchés agricoles à l'Organisation mondiale du commerce inquiètent Agropur. Même si le ministre d'État à l'Agriculture, Jean-Pierre Blackburn, a réaffirmé hier devant les délégués d'Agropur que le Canada défendra le système de gestion de l'offre.

L'expansion étrangère permet à Agropur de mieux se préparer en diversifiant ses marchés et en réduisant sa dépendance au marché intérieur, qui est de toute façon saturé. Saputo, Parmalat et Agropur occupent d'ailleurs à eux trois environ 75% du marché canadien.

L'expansion permet aussi de produire à moindre coût pour mieux profiter de la croissance internationale du marché laitier. Car, s'il en coûte 75 cents pour produire un litre de lait au Canada, selon les estimations de Pierre Claprood, il n'en coûte que de 30 à 35 cents aux États-Unis, et moins de 25 cents en Argentine. «L'Argentine peut ainsi servir de base d'exportation vers d'autres pays», note M. Claprood.

Cette stratégie d'Agropur est analogue à celle mise de l'avant par Saputo. Lundi, le PDG, Lino Saputo fils, déclarait qu'il pouvait se permettre des acquisitions étrangères d'une valeur totale de 2,5 milliards de dollars.

Doubler le chiffre d'affaires

En dépit d'une baisse des prix mondiaux et d'une forte concurrence dans le marché canadien, Agropur a annoncé à ses 3533 membres un chiffre d'affaires de près de 3,1 milliards pour l'exercice 2009 qui s'est terminé le 31 octobre dernier. Cela représente une hausse de 8,1%, principalement due aux nouvelles acquisitions.

«On double le chiffre d'affaires tous les 10 ans, et tout porte à croire que ce sera encore possible dans la prochaine décennie», a déclaré le président d'Agropur, Serge Riendeau.

La coopérative a dégagé un bénéfice avant ristournes de 138 millions, comparativement à 121 millions en 2008. Les ristournes, versées en parts et en espèces, totalisent 92 millions.

En incluant les premiers mois de l'exercice 2010, Agropur a une dette d'environ 125 millions, que Pierre Claprood estime pouvoir effacer d'ici la fin de l'été. À moins qu'il n'y ait d'autres acquisitions d'ici là, précise-t-il.