Amendes plus salées, nouvelles exigences et règles resserrées : comme prévu, Québec a déposé mercredi un projet de loi qui entend serrer la vis aux entreprises minières. Alors que certains acteurs de l'industrie s'inquiètent déjà pour leur compétitivité, l'opposition et les groupes de pression, eux, parlent de «déception».

«Ce projet de loi est une réponse claire aux exigences et aux demandes de la population du Québec», a dit le ministre délégué aux Ressources naturelles et à la Faune, Serge Simard.

En entrevue à La Presse Affaires, le ministre a admis que certains éléments du projet sont inspirés des critiques du vérificateur général du Québec, qui avait soulevé l'indignation au printemps dernier en pointant l'incapacité du gouvernement à surveiller l'industrie minière.

Parmi les changements les plus importants, notons l'obligation pour les entreprises de tenir des consultations publiques avant d'entamer la construction de toute mine, peu importe sa taille.

Les entreprises devront aussi verser 100% des garanties financières nécessaires à restaurer leur site après sa fermeture, et le versement de cette garantie sera accéléré.

L'Association minière du Québec, qui représente les entreprises qui exploitent des mines, ne fera connaître ses réactions qu'aujourd'hui. Du côté des explorateurs miniers, les changements sont généralement accueillis favorablement... malgré quelques inquiétudes.

«C'est un virage important, dit Jean-Pierre Thomassin, directeur général de l'Association de l'exploration minière du Québec (AEMQ). On est d'accord avec le virage : les mines, ce n'est plus seulement de l'économie, c'est aussi l'environnement et le volet social. Certaines contraintes administratives nous semblent exagérées, mais on va vivre avec.»

Le principal irritant vient des amendes en cas d'écart de conduite. Une entreprise qui laisserait du matériel sur un site d'exploration, par exemple, essuierait une amende entre 50 000 $ et 100 000 $.

«Si les amendes étaient élevées pour tout le monde, je n'aurais aucun problème. Mais pourquoi une entreprise minière devrait-elle payer plus que quelqu'un d'autre qui commet les mêmes infractions ?» se demande M. Thomassin.

Georges Beaudoin, professeur au département de géologie et de génie géologique à l'Université Laval, trouve aussi que certaines mesures ont pour effet de «cibler une industrie par rapport aux autres».

Autre problème aux yeux de l'industrie : l'obligation pour les entreprises de divulguer les données recueillies au cours des travaux d'exploration. Selon la Fédération des chambres de commerce du Québec, cela «risque de nuire à la concurrence des entreprises exploratrices et d'en décourager certaines», des craintes partagées par l'AEMQ.

Le projet de loi obligera aussi une entreprise qui possède un droit d'explorer le sous-sol à en aviser le propriétaire du terrain.

Le Parti Québécois, lui, n'a vu «rien de rassurant» dans le projet de loi. «Après le rapport dévastateur du vérificateur général en mars dernier, nous étions en droit de nous attendre à des mesures nettement plus musclées», a dit Denis Trottier, porte-parole de l'opposition officielle en matière de mines et de forêts.

La Coalition pour que le Québec ait meilleure mine a aussi parlé d'une «montagne qui accouche d'une souris».

La coalition a identifié cinq «lacunes majeures», dont le fait que la facture de plusieurs millions découlant des sites miniers abandonnés par le passé repose toujours sur le dos des contribuables québécois. La Coalition aurait aussi aimé des conditions spéciales de restauration pour les mines à ciel ouvert ainsi qu'un moratoire sur l'exploration de l'uranium.