Revenu Québec vient de frapper un réseau d'arnaqueurs qui aurait incité des investisseurs à vider illégalement leurs REER sans payer d'impôts. Quelque 200 particuliers auraient participé au stratagème pour des sommes avoisinant les 10 millions de dollars.

Jeudi, le fisc a fait saisir les comptes de banque de plusieurs entreprises de Montréal et de Repentigny impliquées dans cette affaire. Parmi elles, mentionnons le Groupe Bergamote, Les Aliments Permalyn et Technopharm Industries. Deux individus sont également visés par les saisies, soit Michel Rolland et Alexandre Royer.

 

Le stratagème n'est pas nouveau. Essentiellement, les arnaqueurs recrutent les investisseurs par l'entremise d'annonces classées dans les journaux locaux ou sur l'internet. Ils leur proposent de transférer leurs REER immobilisés dans un régime de pension agréé (RPA) obtenu sous de fausses représentations auprès de Revenu Canada.

Après divers transferts entre sociétés liées, une partie des sommes, typiquement 40 à 50%, est remise aux investisseurs, tandis que le reste va aux cerveaux du stratagème. L'arnaque vise également les CRI, soit les comptes de retraite immobilisés.

Rolls-Royce, Porsche...

Les entreprises utilisaient des prête-noms, des casiers postaux et des comptes de banque dans différents secteurs, tels Outremont, Montréal et Richelieu. Le stratagème semblait payant, puisqu'en février dernier, l'une des têtes dirigeantes, Alexandre Royer, a fait des transactions sur deux Rolls-Royce, une Porsche et un Jeep.

Les investisseurs venaient de partout au Québec. Ils ne sont pas nécessairement blancs comme neige dans cette affaire. Certains sont peut-être naïfs, mais d'autres ont accepté sciemment de participer au stratagème, croit Revenu Québec.

«Les gens qui changent leur REER ou leur CRI peuvent souvent être au courant des irrégularités du procédé», affirme Diane Nadeau, chef de service à la division des enquêtes de Revenu Québec.

Le stratagème est typiquement populaire en période de récession. Nombre de contribuables perdent leur emploi, mais doivent tout de même acquitter leurs factures. La tentation est parfois grande de répondre aux annonces classées qui promettent de faire des miracles avec le REER ou le CRI.

L'enquête de Revenu Québec a été menée en collaboration avec l'Autorité des marchés financiers (AMF) et portait le nom de «Projet Solar». Dans ce dossier, Revenu Québec réclame 2,8 millions de dollars d'impôts impayés aux entreprises et aux deux têtes dirigeantes du réseau. La réclamation du fisc porte sur les revenus tirés du stratagème.

Selon une vérification de La Presse, les deux personnes visées par le fisc ont déjà eu maille à partir avec les autorités. Au début des années 2000, Michel Rolland a fait l'objet de blocages de la Commission des valeurs mobilières du Québec (CVMQ) pour le même genre de stratagème. La CVMQ est l'ancêtre de l'AMF.

Quant à Alexandre Royer, il a notamment été trouvé coupable de voies de fait et de harcèlement criminel pour des méfaits commis en 1996 dans la région de Victoriaville.