Vincent Lacroix a eu beau avoir reçu la peine presque maximale pour fraude, ses victimes restent insatisfaites. Elles n'en veulent toutefois pas au juge qui a déterminé la peine d'emprisonnement, mais bien aux lois telles qu'elles sont faites.

Pierre Gravel, qui a perdu 300 000$ dans cette fraude, n'a «pas du tout, pas du tout» l'impression que justice a été rendue.

«Les dommages qui ont été causés, c'est pas mal plus que des millions, c'est des vies qui sont complètement défaites. J'ai un des mes amis qui a perdu 900 000$. Lui, il a passé neuf mois à l'hôpital, en dépression, et il ne s'en est jamais remis. Ca, ça ne se mesure pas en argent», a déploré M. Gravel.

De son côté, Jean-Guy Houle est mécontent, mais comprend que le juge a fait ce qu'il pouvait, compte tenu des lois existantes.

«C'est minime. Et on entend, à la lecture, le juge dire qu'il (Lacroix) a ébranlé le pays dans l'économie et dans le (système) financier. Et on se retrouve avec 13 ans. Il va faire 11 mois, 12 mois, puis après ça, il va être libéré ce gars-là. Tandis que tous les autres, les investisseurs, ils vont peiner encore le reste de leur vie. On n'en a pas de lois; c'est cruel à dire mais...», a laissé tomber M. Houle, désabusé.

M. Houle, qui a perdu 195 000$ dans la fraude, se dit lui-même «très, très amer» face aux dirigeants politiques qui ont toléré ces peines pas assez sévères selon lui et face aux libérations conditionnelles qui sont si facilement accordées, selon lui. «Ca ne donne pas confiance à aucun investisseur», a-t-il lancé.

«On voit qu'on n'est pas en voiture avec les lois au Québec», a encore dit M. Houle.

Une autre des victimes de Vincent Lacroix, Michel Vézina, abonde dans le même sens. «Je trouve ça épouvantable, quand même, parce que nous, on est encore en prison, dans le fond. Moi j'attends après ma libération pour prendre une bonne retraite. Ca n'a pas de sens», a-t-il dit.

Il trouve au moins que le juge a tenu compte des conséquences humaines pour les victimes. «C'est apprécié. Mais les lois telles qu'elles sont faites, il ne peut pas aller plus haut que ça, alors qu'est-ce que vous voulez qu'on fasse?», s'est-il exclamé.

M. Vézina accueille tout de même favorablement le fait que la peine de 13 ans de Vincent Lacroix au criminel sera consécutive à la peine déjà imposée au pénal. «C'est un baume sur la plaie. Ca fait du bien d'entendre ça. Au moins, il n'aura pas une déduction de 5 ans sur la peine qui a été accordée ce matin.»

Les victimes font preuve de compréhension envers le juge, qui a fait le plus qu'il pouvait, mais ils lancent maintenant la balle aux dirigeants politiques, afin que ceux-ci durcissent les peines et les lois.

«M. (le premier ministre Stephen) Harper, présentement, il est dans une position idéale pour représenter son projet de loi et dire: «regardez les partis, vous êtes tous d'accord avec ça, être plus sévères? Alors on va en voter des lois qui vont être plus sévères pour vraiment dissuader ces gens-là.» Tant que ça ne sera pas fait, ce sont des promesses en l'air. On les a tous rencontrés. Les partis sont tous d'accord avec nous autres. Eh bien qu'ils le fassent! Et qu'ils n'attendent pas pour ça», a lancé M. Gravel.

Du côté de l'Autorité des marchés financiers, le responsable des relations avec les médias, Sylvain Théberge, a affirmé que «l'Autorité des marchés financiers a toujours souhaité une sentence exemplaire pour Vincent Lacroix» et qu'en conséquence, la peine de 13 ans qui lui a été infligée «nous satisfait».

L'AMF souhaite cependant étudier plus à fond ce jugement «très étoffé et très important» avant de le commenter davantage.