Selon son PDG, le Cirque du Soleil maintient l'équilibre parmi ses affaires et projets malgré les déboires de son actionnaire arabe, le fonds d'investissement Istithmar World du gouvernement de Dubaï.

Un an à peine après son achat de 20 % du capital-actions du Cirque, pour une somme estimée à 600 millions US, Istithmar se retrouve dans des remous financiers tels qu'il pourrait revendre des placements pour se renflouer.

Il risquerait même le démantèlement, ce qui serait inédit parmi les fonds souverains vedettes des dernières années, selon la presse financière britannique et américaine.

Mais au siège social du Cirque, le PDG, Daniel Lamarre, se déclare « pas nerveux du tout « face aux problèmes de son principal partenaire financier. « Ça ne touche pas les activités du Cirque, ni ses moyens financiers. Son investissement de l'an dernier nous a déjà été entièrement payé «, a souligné M. Lamarre en entretien avec La Presse Affaires.

Une précision cependant : l'argent payé par Istithmar est allé au cofondateur du Cirque, Guy Laliberté, à des fins de gestion de patrimoine familial, tel qu'il l'avait indiqué en août 2008.

« Le Cirque n'avait pas besoin de ces capitaux parce que sa structure financière est légère, axée surtout sur la gestion des cash flows. Ce sont nos partenaires qui investissent le plus dans les immeubles de nos spectacles permanents, pas nous «, rappelle le PDG du Cirque.

« Avec Dubaï, ils nous ont fait une offre exceptionnelle pour entrer au capital. Maintenant, s'ils devaient revendre des placements, je ne crois pas que nous serons les premiers. Le Cirque est perçu à Dubaï comme l'un de leurs meilleurs investissements. «

Mais qu'est-ce qui cloche tant chez Istithmar, qui relève d'un petit émirat réputé riche et dynamique ?

Pour l'essentiel, ce fonds souverain a mené pour plus de 125 milliards US en investissements internationaux depuis cinq ans.

Or, il appert que la majeure partie de ces placements à prix forts furent financés auprès de banques d'Europe et du Moyen-Orient.

Et dans l'après-krach financier de 2008, Istithmar doit se refinancer à coûts élevés avec une partie de ces actifs fortement dépréciés.

Selon l'agence Bloomberg, la société d'État qui chapeaute Istithmar, Dubaï World, a pour 12 milliards US en dettes à restructurer, dont le tiers dès les prochains mois.

Par ailleurs, on doute qu'elle puisse obtenir de nouveaux capitaux du gouvernement de Dubaï, qui a aussi gonflé sa dette pour susciter un boom économique.

Au dernier compte, cette dette rendue à 80 milliards US cotait à presque 100 % du produit intérieur brut (PIB) de ce petit émirat dont l'économie repose sur les services : immobilier, finances, commerce, transports.

Ces derniers mois, les émirats voisins de Dubaï comme Abu Dhabi, riche en pétrole, lui ont avancé des milliards en soutien.

Entre-temps au Cirque du Soleil, en cas de mise en vente du bloc de 20 % des actions, Daniel Lamarre assure que son patron ultime, Guy Laliberté, aurait un plein droit de regard en tant qu'actionnaire majoritaire et cofondateur.

« Le contrat d'investissement est très clair. Avec 80 % des parts, Guy Laliberté est resté en contrôle complet de son cirque. Aucun changement de la structure de propriété ne peut se faire sans son accord. «

Donc, pas de soucis immédiat pour le célèbre milliardaire québécois, à deux semaines de son périple orbital de 35 millions US à bord d'une capsule russe et de la Station spatiale.

Mais à Dubaï, qui subit les contrecoups du krach de l'an dernier, l'intérêt envers l'aventure spatiale de Guy Laliberté risque d'être limité.

D'autant plus que, face au soudain ralentissement économique de Dubaï, le Cirque a y « reporté indéfiniment « ses projets d'un spectacle permanent et d'un bureau de développement.

Pourtant, lors de l'annonce du placement d'Istithmar en août 2008, ces projets furent promus comme une partie importante du partenariat.

« C'est sûr que le marché de Dubaï se porte moins à un projet de spectacle permanent. Nous l'avons retiré de notre carnet de commandes, d'autant qu'il y a beaucoup d'appétit ailleurs pour un spectacle du Cirque «, selon M. Lamarre.

Aussi, le projet de Dubaï, prévu « pour 2012 au plus tôt «, en n'était encore qu'aux premières étapes de « concepts « avant sa mise de côté.

Par conséquent, à peine une dizaine de concepteurs du Cirque auraient subi un changement de mandat.

« Nous les avons redirigés vers nos projets à New York, que nous avons pu devancer, ainsi que ceux de Londres et de Madrid «, a dit le PDG du Cirque.

 

LE CIRQUE DU SOLEIL EN CHIFFRES

CHIFFRE D'AFFAIRES

2008

733 millions US

PRÉVISION EN 2009

env. 800 millions US

BÉNÉFICE D'EXPLOITATION

2008 > 175 millions US

EFFECTIFS

environ 4200 employés (1800 au Québec)

VALEUR D'ENTREPRISE

environ 2,7 milliards US

Sources : Cirque du Soleil, La Presse, Forbes, Bloomberg

 

ACTIONNARIAT

DUBAÏ WORLD

Filiales Istithmar World Capital et Nakheel

20%

GUY LALIBERTÉ

Cofondateur et président du CA

80%