Plus de camions et de bateaux chargés de marchandises qui quittent le Québec: au premier coup d'oeil, ça semble prometteur. Mais ne fêtez pas trop vite, ont averti hier les économistes. Malgré une légère hausse en juin, le Québec continue et continuera de souffrir d'une baisse importante de ses exportations internationales.

Les exportations québécoises vers l'étranger ont augmenté de 0,4% en juin. Une hausse certes, mais beaucoup trop faible et de courte durée pour faire oublier LE chiffre qui fait mal. Pendant les six premiers mois de l'année, les exportations internationales ont dégringolé de 15,4%.

«Qu'on voie une pause en juin, c'est quand même bienvenu, dit Hélène Bégin, économiste principale au Mouvement Desjardins. Mais il est trop tôt pour dire que c'est la fin de la détérioration. À notre avis, ce n'est qu'une pause dans la tendance baissière.»

Demandez à son homologue de la Financière Banque Nationale, Marc Pinsonneault, si les chiffres d'hier dépeignent une reprise économique et sa réponse est claire.

«Non, non, non, non, tranche l'économiste. C'est seulement sur un mois et ce n'est pas très convaincant.»

Depuis le sommet atteint à la fin 2008, les exportations internationales du Québec ont chuté de rien de moins que 21,9%. Ça veut dire que pour cinq camions qui partaient pour les États-Unis à la fin 2008, il n'en reste plus que quatre.

«C'est énorme, souligne Hélène Bégin. Une baisse de plus de 20% des exportations internationales, c'est vraiment majeur.»

Pour Marc Pinsonneault, de la Nationale, le portrait dressé hier par l'Institut de la Statistique du Québec est très simple. «C'est celui d'une économie en récession», dit-il.

Les exportations avaient d'ailleurs subi une baisse comparable de 22,1% pendant la récession de 1990-1991.

Causes et solutions

Les causes ne sont un secret pour personne. Encore 75% de nos exportations prennent le chemin des États-Unis, et les Américains ne consomment plus. Mais nos exportations avaient déjà commencé à diminuer avant la crise, notamment à cause de la concurrence chinoise pour le marché américain.

Hélène Bégin, de Desjardins, prévoit que les exportations repartiront vers le haut d'ici la fin de l'année, mais ne s'attend pas à voir les camions se bousculer soudainement à la frontière.

«À notre avis, la pente va être longue à remonter», dit-elle

Malgré la reprise économique qui se dessine, deux éléments viendront mettre du sable dans l'engrenage des exportateurs. D'abord le dollar canadien, qui est remonté au-dessus des 90 cents US et nuit à la compétitivité. Ensuite les mesures protectionnistes instaurées aux États-Unis, qui favorisent les fabricants locaux.

Et reprise ou pas, rappelle Mme Bégin, la concurrence pour le marché américain ne fera que s'intensifier.

Ceux qui tiennent mordicus à voir des bonnes nouvelles pourront en trouver dans la balance commerciale du Québec. Parce que si les exportations baissent vite, les importations baissent encore plus vite: pendant les six premiers mois de l'année, elles ont chuté de 21%.

Encore une fois, les économistes jouent les rabat-joie. Si les importations baissent, explique Marc Pinsonneault, c'est un signe que la demande intérieure est en panne.

«La balance commerciale s'améliore pour les mauvaises raisons», résume l'économiste, qui croit tout de même que les exportations sont appelées à croître plus vite que les importations, ce qui finira par améliorer la balance commerciale «pour les bonnes raisons».

Les solutions? Ce sont toujours les mêmes: diversifier les marchés pour réduire la dépendance envers les États-Unis... et augmenter notre commerce avec le reste du Canada, comme le proposait le ministre du Développement économique, Clément Gignac, dans La Presse Affaires de samedi dernier.