Pendant que les victimes du financier Earl Jones ragent, le fisc québécois a rattrapé un autre homme d'affaires poursuivi par des investisseurs: Benoit Laliberté.

Revenu Québec lui réclame 24,2 millions de dollars pour des taxes et des impôts impayés, a appris La Presse Affaires. Une bataille devant les tribunaux a été entreprise au cours des derniers mois pour les années fiscales 1997 à 2003. Benoit Laliberté avait lancé la firme techno Jitec en 2000. L'entreprise avait explosé en Bourse avant de s'aplatir comme une crêpe. Poursuivi par les autorités boursières, Benoit Laliberté a été reconnu coupable, au début de 2008, d'avoir trompé les investisseurs, ce qui lui a valu une amende de 893 000 $. Une requête en recours collectif est toujours devant les tribunaux.

Le litige fiscal avec Revenu Québec prend la forme de trois requêtes. Benoit Laliberté s'est adressé à la Cour supérieure en début d'année pour contester les avis de cotisation de 2005 et 2008.

Une fraude fiscale ?

En mai, le fisc a répliqué en affirmant que Benoit Laliberté avait fait «une fausse représentation des faits par incurie ou par omission involontaire ou a commis une fraude, en omettant de déclarer ces revenus d'entreprise et de payer les impôts y afférents».

Le fisc québécois réclame en particulier 23,6 millions en impôts sur le revenu de la compagnie à numéro 9033-9813 Québec inc. Il s'agit d'une entreprise qui exploitait un commerce d'ordinateurs et d'équipements informatiques entre 1997 et 2002.

Revenu Québec a scruté les livres de l'entreprise en 2004 et constaté qu'elle ne tenait aucun registre concernant ses revenus d'exploitation. Le fisc a donc établi les impôts à payer en se basant sur les dépôts faits par l'entreprise à la Banque Nationale et à la Caisse populaire de Saint-Hubert.

Au total, le fisc a donc constaté que les revenus de 9033-9813 Québec inc. se sont élevés à 36,7 millions pour les sept années de 1997 à 2002. En particulier, les années 1998, 1999 et 2000 lui auraient procuré des revenus de 10,2 millions, 4,4 millions et 8,1 millions respectivement.

Revenu Québec réclame également 217 346 $ en TVQ impayée et en pénalités, ainsi que 427 355 $ d'impôts impayés pour l'entreprise Vectoria informatique et télécommunication, qu'administrait Benoit Laliberté, selon le fisc.

En réplique, Benoit Laliberté affirme dans une requête que les réclamations pour les années d'imposition 1997 à 2000 inclusivement sont prescrites, «les avis de cotisation ayant été émis à l'extérieur des délais».

Qui plus est, l'homme d'affaires soutient qu'il n'avait plus aucun intérêt dans la compagnie 9033-9813 durant les années en litige puisqu'il avait cédé ses actions à un certain Simon Lamarche.

Revenu Québec n'est pas d'accord avec cette interprétation des faits. Certes, les actions de 9033 ont été transférées à Simon Lamarche le 12 juin 1997, mais, le même jour, Benoit Laliberté et Simon Lamarche avaient convenu que Benoit Laliberté continuerait d'utiliser le compte bancaire de 9033.

En outre, lors d'une vérification fiscale en 2003 et 2004, le fisc a constaté que Benoit Laliberté utilisait le compte bancaire de 9033 pour son commerce d'équipements informatiques et qu'il en était le signataire autorisé.

Bref, c'est la guerre entre Revenu Québec et Benoit Laliberté. Reste à savoir si l'entrepreneur, advenant qu'il perde sa cause, pourra payer au fisc les 24,2 millions qu'il réclame...