Entre sa ferme laitière et la table de négociation, le président de l'Union des producteurs agricoles (UPA), Christian Lacasse, aura un été chargé. Son organisme est en discussions avec le gouvernement afin de sauver les bases d'un important programme d'assurance de revenus pour les agriculteurs.

L'UPA demande aussi à l'État québécois de plus que doubler sa contribution à la Financière agricole, l'institution par laquelle passe le financement public du secteur agricole.

Créé en 1975, le Programme d'assurance stabilisation des revenus agricoles (ASRA) offre une compensation financière aux agriculteurs lorsque les prix du marché d'un produit sont insuffisants par rapport aux coûts de production.

L'ASRA peut représenter jusqu'à 50% du revenu d'un agriculteur (comme dans le domaine de l'agneau par exemple), même si la proportion varie beaucoup d'un secteur à l'autre.

«Toutes les productions sont soumises à des fluctuations de prix dans le temps, explique le président de la Fédération des producteurs de porcs du Québec (membre de l'UPA), Jean-Guy Vincent. C'est là qu'on a besoin d'un soutien gouvernemental pour maintenir nos fermes. C'est du vivant. On ne peut pas arrêter de produire un matin et repartir tout ça dans trois mois. On a besoin d'une assurance.»

L'ASRA est financée au tiers par les assurés, le reste étant à la charge de la Financière agricole.

Or, le déficit de ce programme, offert en complément à un programme fédéral, navigue autour de 780 millions de dollars, soit un peu moins que la valeur totale des compensations totales versées en vertu du programme pendant l'année financière 2007-2008.

Depuis 2003, les besoins ont explosé, particulièrement dans le secteur de la viande.

Afin de remédier à l'impasse financière, le rapport Saint-Pierre, commandé par Québec et publié en février dernier, recommande de réduire progressivement la portée de l'ASRA, puis de le remplacer par un programme qui favoriserait l'autogestion du risque par les agriculteurs.

Selon l'interprétation qu'en fait Christian Lacasse, le calcul du revenu garanti ne serait plus basé sur les coûts de production.

«La baisse de compensation serait plus importante dans les régions périphériques, calcule-t-il. Le gouvernement serait bien mal venu d'aller en ce sens.»

Selon M. Lacasse, les arguments de l'UPA portent leurs fruits. «Dans les travaux du comité bipartite, les représentants du gouvernement remettent beaucoup en cause l'ASRA», dit-il.

Du côté du ministère de l'Agriculture, des Pêches et de l'Alimentation (MAPAQ), Jacynthe Lafontaine, conseillère en communications, n'a pas confirmé que l'ASRA allait survivre. «Je ne peux pas m'avancer sur ce sujet-là», a-t-elle dit.

L'UPA a mis de l'avant certaines propositions pour mettre l'ASRA au goût du jour, notamment de moduler les primes selon la taille des entreprises agricoles.

«Nos objectifs, c'est de rendre ces programmes plus efficaces, de favoriser une meilleure utilisation des fonds publics et de faire en sorte que ces programmes soient plus défendables du point de vue de l'opinion publique et des décideurs», dit Christian Lacasse.

Le MAPAQ n'a pas voulu se prononcer sur les propositions de l'UPA, qui souhaiterait aussi que les programmes de sécurité du revenu s'étendent au-delà des 17 secteurs actuellement couverts.

L'UPA estime aussi que le gouvernement provincial sous-finance la Financière agricole, ce qui force l'organisme à emprunter pour payer ses primes. «On ne peut plus financer les programmes avec une enveloppe de 305 millions, dit M. Lacasse. L'enveloppe nécessaire est plutôt de 650 millions de dollars.»

«Ça prend une intervention à la hauteur de ce que le Québec veut se donner comme agriculture», ajoute Jean-Guy Vincent.

Les deux parties espèrent pouvoir en venir à une entente au début de l'automne.