Le ministre des Ressources naturelles et de la Faune du Québec, Claude Béchard, a déposé vendredi un projet de loi qui vise à assurer une exploitation plus équilibrée de la forêt québécoise.

Le projet de refonte du régime forestier modifiera l'attribution des stocks de bois dont disposent les entreprises forestières et prévoit aussi la création d'une bourse de la forêt, qui permettra d'établir un marché qui déterminera le prix du bois provenant des forêts privées et publiques.

La législation, qui fera l'objet de consultations en vue de son adoption d'ici la fin de l'année, prévoit la création d'instances locales regroupant divers représentants élus ou d'entreprises concernés par l'aménagement et l'exploitation des forêts, a déclaré M. Béchard lors d'une conférence de presse.

«Donner plus de pouvoirs aux intervenants régionaux, je n'appelle pas ça politiser, j'appelle ça régionaliser, a-t-il dit. J'appelle ça décentraliser et faire en sorte que les régions vont enfin pouvoir adopter des modèles de gestion qui correspondent à leurs forêts.»

Avec le projet de loi présenté vendredi, Québec souhaite aussi éviter que certaines entreprises disposant de contrats d'approvisionnement et d'aménagement forestier (CAAF) laissent du bois inutilisé après avoir réduit leur production pour des raisons diverses.

À titre d'exemple, sur les 25 millions de mètres cubes de bois dans les forêts publiques, l'an passé, environ 17 millions ont été transformés par les compagnies.

Si la législation est adoptée, le gouvernement remplacerait d'ici 2013 les 300 CAAF, consentis aux compagnies forestières, par des garanties d'approvisionnement.

En vertu du projet de loi, les entreprises disposant actuellement de CAAF obtiendraient plutôt la garantie d'un approvisionnement équivalent à 70 pour cent du contrat qu'elles détenaient et devraient compléter leur approvisionnement par l'intermédiaire d'une bourse de la forêt.

«Le marché public du bois va venir libérer ces volumes-là pour des plus petites entreprises, pour des entreprises de deuxième, troisième transformation qui aujourd'hui n'ont pas accès à cette forêt-là mais qui dans l'avenir vont y avoir accès par la bourse du bois ou le marché public du bois, a-t-il dit. Donc, davantage de bois transformé, davantage d'emplois créés au Québec aussi.»

Le projet de loi vise à modifier le régime forestier québécois adopté il y a plus de 20 ans.

Les changements qu'il introduit font suite à plusieurs initiatives amorcées en vue d'assurer un développement plus équilibré de la forêt québécoise.

En 2004, la commission d'étude sur la gestion de la forêt québécoise, présidée par Guy Coulombe, avait conclu qu'il était nécessaire de revoir le régime.

Un sommet de la forêt, qui s'est tenu en 2008, a permis au gouvernement d'accoucher d'un livre vert, qui a donné le coup d'envoi à de nombreuses consultations.

Vendredi, le Conseil de l'industrie forestière du Québec, qui représente les entreprises de ce secteur d'activité, a réservé un accueil prudent au projet de loi, reportant ses commentaires à plus tard, une fois l'étude du texte complétée.

La section québécoise du Syndicat canadien des communications, de l'énergie et du papier a pour sa part exprimé sa déception que le projet de refonte du régime forestier n'aborde pas la question de la syndicalisation des travailleurs.

«Tant et aussi longtemps que les droits syndicaux ne seront pas traités, nous ne pourrons nous prononcer et encore moins appuyer ce projet», a dit le vice-président Renaud Gagné, dans un communiqué.

L'opposition officielle a accueilli avec ouverture les grandes orientations du projet de loi, comme la fin de l'attribution des approvisionnements en bois conjointement avec les responsabilités d'aménagement et de reboisement, comme le prévoyaient les CAAF.

Mais le porte-parole péquiste en matière de mines et forêts, Denis Trottier, s'est inquiété des ressources qui seront affectées à la mise en place du nouveau régime forestier et il a exprimé son scepticisme quant à son éventuelle adoption.

«S'il faut saluer cette proposition qui devra traverser l'étape d'une consultation, on peut aussi douter de la volonté du gouvernement de mener à bien un tel projet, compte tenu des nombreuses annonces non respectées depuis quelques années», a-t-il déclaré dans un communiqué.