Le gouvernement Charest doit porter l'odieux des résultats financiers désastreux de la Caisse de dépôt et placement du Québec, ont soutenu vendredi les partis d'opposition.

Le Parti québécois, l'Action démocratique et Québec solidaire ont tous pointé du doigt le gouvernement libéral pour les énormes pertes appréhendées du «bas de laine des Québécois».

Selon des informations colligées par La Presse, la Caisse de dépôt accusera en 2008 un rendement négatif de 26 pour cent, soit une perte de 38 milliards de dollars.

La Caisse affichera une performance nettement plus médiocre que celle de l'ensemble des grandes caisses de retraite au Canada, qui subiront, d'après les spécialistes, un recul de 16 pour cent en moyenne pour l'année 2008.

Si ces chiffres se confirment, il s'agira des pires résultats obtenus par la Caisse en 45 ans d'histoire.

Poussée par le gouvernement libéral à rechercher le rendement maximal, la Caisse a fait des choix malheureux qui l'ont menée au bord de l'abîme, a accusé le député péquiste François Legault.

«Il y a une partie importante de la perte qui est attribuable au choix qui a été fait par le gouvernement Charest de se concentrer seulement sur les rendements à court terme sans se soucier du risque. C'était une erreur du gouvernement Charest, une erreur très coûteuse», a analysé M. Legault, porte-parole de l'opposition officielle en matière d'économie et de finances.

La Caisse avait débuté l'année 2008 avec 155,4 milliards $ dans ses coffres. À la fin du mois de décembre, la cagnotte n'était plus que de 120 milliards $.

En tenant compte des 3 milliards $ versés par les grandes caisses d'assurance publiques comme la Régie des rentes, le gouffre financier atteint 38 milliards $.

De l'avis du député Legault, il est urgent de rééquilibrer le mandat de la Caisse afin de stopper l'hémorragie.

«Il faut que la politique de placement soit modifiée. On doit intervenir», a insisté M. Legault, qui demande la tenue d'une commission parlementaire pour réviser les pratiques de placement de la société d'État.

La Caisse a échoué sur toute la ligne, tant sur le plan du rendement que sur celui du développement économique, a de son côté décrié le chef démissionnaire de l'Action démocratique, Mario Dumont.

Si les gestionnaires de la Caisse doivent assumer leur part du blâme, la responsabilité ultime revient au gouvernement Charest, a-t-il argué.

«Que s'est-il passé? Est-ce que c'est la ministre des Finances, le premier ministre, est-ce que c'est à travers les nominations au conseil d'administration? À quel niveau le gâchis s'est-il installé?», a demandé M. Dumont en point de presse à Québec.

Avec un recul d'environ 26 pour cent, la moyenne de croissance de la Caisse dépassera à peine quatre pour cent sur une période de dix ans, ce qui est bien loin de la cible de 7 pour cent.

Le niveau de 7 pour cent est pourtant le seuil requis de croissance estimé par la Caisse pour faire face aux obligations des régimes d'assurance et de retraite.

Reste que ces chiffres ne sont pas encore définitifs, car ils n'ont pas reçu l'approbation du comité de vérification interne de la Caisse et du Vérificateur général.

L'institution doit présenter ses résultats officiels à la fin du mois et d'ici là, elle refuse de discuter de sa situation financière.

«Il n'est pas question pour nous de commenter des rumeurs alors que nous sommes engagés dans un processus rigoureux de vérification», a dit Maxime Chagnon, porte-parole de la Caisse.

Quoi qu'il en soit, le député de Québec solidaire Amir Khadir considère qu'il est impératif de recentrer le mandat de la Caisse vers des créneaux à ses yeux plus acceptables.

«Il est grand temps de modifier le mandat de la Caisse de dépôt et de placement pour qu'elle investisse dans des entreprises écologiques et socialement responsables, de préférence au Québec», avance le député de Mercier dans un communiqué.

En imposant à la Caisse une orientation basée sur la recherche «du profit maximal à court terme», le gouvernement a été l'artisan de la débâcle, note M. Khadir.

Quant à elle, la ministre des Finances Monique Jérôme-Forget n'a pas voulu accorder d'entrevue.