Les quatre groupes télé francophones Groupe TVA, Bell Média, V Média et Corus auront  dorénavant un seuil minimal à dépenser pour les séries télé originales en français.

Dans une décision rendue aujourd'hui, le Conseil de la radiodiffusion et des télécommunications canadiennes (CRTC) les oblige à consacrer 75% de leur budget de contenu canadien pour des émissions originales de langue française, par exemple des séries télé.

En pratique, cette nouvelle condition de licence imposée par le CRTC ne changera rien à l'écran pour les chaînes du Groupe TVA, qui consacrait déjà 86% de son budget de contenu canadien en 2016-17 pour des séries originales francophones (ex : Fugueuse, L'imposteur, O'). Idem chez Groupe V Média, qui dépensait 94% de son budget de contenu canadien en émissions originales francophones.

Par contre, ce nouveau seuil de 75% forcera Bell Média et Corus à dépenser davantage en contenu original francophone sur ses chaînes. En 2016-17, Bell Média dépensait 70% de son budget de contenu canadien en émissions originales francophones, alors que Corus y consacrait 47% de son budget de contenu canadien. Ces deux groupes télé prévoyaient d'ailleurs diminuer leurs budgets pour la programmation originale francophone : dans des documents déposés au CRTC, Bell Média prévoyait faire passer son seuil de 70% à 50% du budget de contenu canadien, et Corus de 47% à 41%. De leur côté, le Groupe TVA (de 86% à 85%) et le Groupe V Média (de 94% à 96%) prévoyaient garder sensiblement le même seuil de dépenses pour des émissions originales francophones dans son budget de contenu canadien.

Le budget de contenu canadien des groupes télé exigé par leur licence dépend de leurs revenus générés l'année précédente. Une baisse des revenus télé entraîne donc une baisse des exigences réglementaires en contenu canadien.

Le CRTC exigera que tous les groupes télé consacrent 75% de leur budget de contenu canadien pour des émissions originales francophones à compter de l'année 2019-20. Pour l'année 2018-19 (qui commence cette semaine, soit le 1er septembre 2018), le CRTC exige un seuil de 50%, « ce qui permettra aux groupes de s'adapter aux nouvelles exigences », indique l'organisme réglementaire par voie de communiqué.

« Ces mesures mises de l'avant par le CRTC permettront à nos créateurs de produire du contenu original de qualité qui répondra aux attentes des Canadiens tout en s'adaptant aux changements constants dans le milieu télévisuel. Nous continuerons à exiger que ces grands groupes contribuent à l'expansion de la programmation originale canadienne selon leurs capacités financières respectives afin qu'ils jouent un rôle essentiel dans l'économie canadienne », a indiqué Ian Scott, président du CRTC, par voie de communiqué.

Le CRTC a rendu cette décision à la suite d'un réexamen des conditions de licences des groupes télé demandé par le gouvernement Trudeau. En mai 2017, le CRTC avait annoncé de nouvelles conditions de licences, qui ne comprenaient pas de seuil pour la programmation originale francophone. Devant le tollé provoqué dans le milieu culturel québécois, le gouvernement Trudeau a demandé au CRTC de revoir sa décision.

Le CRTC a choisi d'imposer le même seuil à tous les groupes télé francophones, indépendamment du type de chaînes de télé (chaînes généralistes et/ou chaînes spécialisées). Généralement, les chaînes généralistes consacrent une partie plus importante de leur budget à des séries télé originales. Bell Média et Corus n'ont pas de chaîne généraliste francophone, contrairement au Groupe TVA et au Groupe V Média.

En 2016-17, les quatre groupes télé francophones ont consacré 221,4 millions de dollars à des émissions originales de langue française. Selon leurs prévisions envoyées au CRTC dans le cadre de l'audience sur les licences, ce montant serait passé à 174,3 millions en 2021-22, soit une diminution de 47,1 millions. L'imposition du seuil de 75% empêchera la majeure partie de cette diminution prévue.