Le grand patron de Pages Jaunes, Julien Billot, congédié hier après trois ans et demi à la tête du groupe, touchera une indemnité de départ d'au moins 3,8 millions de dollars. Cela équivaut à presque six fois les profits de 658 000 $ affichés par l'entreprise montréalaise à son dernier trimestre.

« CHANGEMENT NÉCESSAIRE »

Julien Billot s'est fait montrer la porte par le conseil d'administration de Pages Jaunes, qui a « décidé qu'un changement au niveau du leadership était nécessaire afin que Pages Jaunes puisse atteindre son plein potentiel », a précisé une porte-parole. 

Malgré ces explications, ce congédiement est considéré comme « sans motif valable » en vertu du contrat de travail du président et chef de la direction. Julien Billot touchera en conséquence des indemnités de départ d'au moins 3,8 millions de dollars, indique la plus récente circulaire du groupe. Il aura droit à deux fois son salaire annuel de base de 875 000 $, ainsi qu'à divers incitatifs en espèces et à des contributions à son régime de retraite. Le montant final des indemnités de départ sera connu en avril prochain.

DÉROUTE BOURSIÈRE

Les investisseurs ont assez mal réagi à ce nouveau changement de cap. Le titre de Pages Jaunes a glissé de 9 % hier à la Bourse de Toronto, à 6,69 $, après avoir perdu 62 % de sa valeur depuis le début de l'année. Il faut dire que Julien Billot, ex-numéro 2 de la société française Solocal, est entré en poste avec un immense défi - et porté par un vent d'enthousiasme - en janvier 2014. Il devait effectuer une transition majeure de l'entreprise vers le numérique. M. Billot a réussi à faire migrer 70 % des revenus vers le numérique, un « accomplissement important », selon le président du conseil de Pages Jaunes, Robert MacLellan. Celui-ci estime toutefois que la société devrait « exploiter davantage son potentiel en mettant plus l'accent sur les résultats opérationnels, l'exécution et les rendements pour les actionnaires ».

RÉSEAUX SOCIAUX

En mai dernier, Julien Billot a admis qu'il n'avait pas prévu une hausse de popularité aussi rapide des réseaux sociaux auprès des PME - une part importante de la clientèle du groupe. « Tout cela est arrivé plus vite qu'on ne l'anticipait », avait-il dit à La Presse canadienne en marge de l'assemblée annuelle des actionnaires. Le dirigeant avait alors présenté une mise à jour de sa stratégie d'affaires, qui devait s'articuler autour de cinq initiatives-clés d'ici 24 mois. Pages Jaunes voulait notamment mettre en oeuvre de nouvelles méthodes de vente et se concentrer sur la croissance de ses filiales, comme JUICE, entreprise de technologie publicitaire spécialisée dans le mobile, et DuProprio, spécialisée dans la vente immobilière.

À QUOI S'ATTENDRE ?

Ken Taylor, chef de la direction financière de Pages Jaunes depuis quatre mois, assurera la direction du groupe pendant le processus de recrutement du successeur de Julien Billot. « [L'entreprise] poursuivra ses initiatives favorisant la croissance de la rentabilité et des flux de trésorerie disponibles à mesure que nous améliorerons notre stratégie de mise en marché », a-t-il indiqué dans le communiqué publié hier. 

M. Taylor a toutefois prévenu que Pages Jaunes serait incapable d'atteindre les cibles qui avaient été fixées en mai dernier en matière de croissance des revenus numériques (+ 4 %). 

Bentley Cross, analyste chez TD, a souligné hier que le changement de garde à la haute direction ouvrirait de nouveaux horizons « aux dépens de la continuité ». Il rappelle que Pages Jaunes a « presque complètement fait le ménage » depuis novembre, avec le départ des anciens chefs des finances et des opérations. Le groupe publiera ses prochains résultats le 10 août prochain.

EN CHIFFRES

206 millions

Capitalisation boursière de Pages Jaunes

189,5 millions

Revenus du groupe au premier trimestre de 2017

- 7 %

Baisse du chiffre d'affaires sur un an