Au lendemain de l'annonce du retrait de son appui financier à Oscar Pistorius, Nike reconsidérera-t-elle ses commandites sportives? «Nous pensons qu'Oscar Pistorius doit bénéficier d'une procédure judiciaire en bonne et due forme et nous continuerons à suivre la situation de très près », a brièvement fait savoir l'entreprise dans un communiqué.

Les charges de meurtre prémédité qui pèsent sur le sprinter handicapé surviennent quelque temps après l'officialisation de dopage de Lance Armstrong. Dans la foulée de cette confirmation, Nike a annulé la commandite du cycliste évaluée à 7,5 millions annuellement. Cette fois, l'entreprise raye un contrat de 2 millions par an avec Pistorius, signé à la suite de la participation de l'athlète aux Jeux olympiques de Londres, l'été dernier. Ironiquement, le slogan de la campagne de Nike avec Pistorius portait comme slogan : «Je suis la balle dans le canon» («The Bullet in the Chamber»). Même s'il est de plus en plus risqué, au point de vue de l'image de marque, de s'associer à des athlètes de haut calibre, Nike n'a pas l'intention de réduire ses investissements. L'entreprise faisait valoir récemment à la Securities & Exchange Commission (SEC) aux États-Unis, vouloir consacrer 3,8 milliards pour la signature de renommés porte-parole, au cours des prochaines années. « À la suite des incidents avec Lance Armstrong, Nike est peut-être en train de réfléchir à sa stratégie de commandite, analyse Luc Dupont, professeur agrégé au département de communication de l'Université d'Ottawa. L'entreprise pourrait notamment revenir à celle des années 1980, à l'époque de Michael Jordan. À cet esprit "Just Do It", soit à l'histoire de gens ordinaires qui décident de foncer tête baissée. Mais le rapport de la SEC fait croire que la présente stratégie n'est pas mise au rancart pour toujours.»

Les frasques de Tiger Woods, de Lance Armstrong et maintenant celles d'Oscar Pistorius... Nike devrait-elle plutôt s'attarder à la commandite de stades ou d'équipes sportives? «La commandite d'athlètes a toujours été payante, dit Paul Wilson, spécialiste en marketing et commandite du cabinet de relations publiques National. Et il y a toujours des risques. Le risque est aussi grand, qu'on commandite un humain ou une équipe. Par ailleurs, Nike pouvait-elle imaginer ce qui arrive à Oscar Pistorius? C'est imprévisible et impensable. Cela dit, Nike va se trouver une autre vedette à appuyer. C'est la beauté de la commandite sportive.»

De toute façon, il serait moins «payant» de commanditer un athlète sans histoire... «On demande aux sportifs d'avoir une vie trépidante, explique Luc Dupont. Les gens veulent acheter ce capital d'excitation. Autrefois, le seul contact avec la vedette sportive était sur le terrain. Aujourd'hui, grâce aux réseaux sociaux notamment, on lui demande de raconter son dernier voyage ou de diffuser des photos de la voiture à 300 000$ qu'elle vient de s'acheter.»

Parallèlement, l'histoire nous montre que Nike est capable de «pardonner». Malgré le désistement de plusieurs commanditaires, dans la foulée des révélations de ses infidélités multiples, Tiger Woods n'a jamais perdu l'appui de Nike, en 2011. Et l'entreprise a conclu une nouvelle entente avec le footballeur Michael Vick, après que celui-ci eut été condamné pour avoir organisé des combats de chiens.