Le Canada doit immédiatement se joindre à la nouvelle mouture du Partenariat transpacifique (PTP), qui ne comprend plus les États-Unis, sans quoi il manquera une occasion d'accroître ses liens commerciaux avec l'Asie, a prévenu un ancien ministre libéral.

Selon John Manley, président du Conseil canadien des affaires et ancien ministre sous Jean Chrétien, l'urgence de la situation est évidente: la relation du Canada avec son partenaire principal, les États-Unis, est en danger en raison des menaces de l'administration Trump de déchirer l'Accord de libre-échange nord-américain (ALÉNA).

«Avec l'état fragile de l'ALÉNA, les priorités commerciales du Canada s'écrivent toutes seules. C'est une affaire de diversification», a expliqué lundi M. Manley, qui est un ancien ministre des Finances et des Affaires étrangères.

«Il sera difficile de remplacer l'accès que nous avons eu aux États-Unis par un accès ailleurs, mais nous devons commencer à travailler là-dessus.»

Voilà pourquoi son conseil a envoyé une lettre au premier ministre Justin Trudeau pour lui dire qu'il est temps, pour le Canada, d'adhérer immédiatement à la nouvelle version du PTP.

La missive signée de la main de 18 chefs de la direction est transmise au premier ministre un peu plus d'un mois après que le Canada a refusé d'appuyer une nouvelle version de l'accord conclu par les 11 autres pays impliqués dans le traité de libre-échange.

M. Trudeau s'était mis à dos certains de ses alliés, notamment l'Australie et le Japon, en déclarant, en marge d'un sommet de la Coopération économique pour l'Asie-Pacifique à Da Nang, au Vietnam, qu'il restait encore beaucoup de travail à faire avant de s'entendre sur le PTP, plus particulièrement en ce qui a trait à la protection des secteurs automobile et culturel du Canada.

«L'Asie agit vraiment rapidement. Si nous laissons passer le PTP, ça ne reviendra plus», a plaidé M. Manley.

D'autres pays, dont la Corée du Sud et l'Indonésie, devraient se joindre au traité commercial, ce qui le rendra encore plus pénétrant en Asie, a-t-il soutenu.

Le Conseil canadien des affaires a supervisé la préparation et l'envoi de la lettre à M. Trudeau. Ses signataires sont issus de divers secteurs, incluant ceux des ressources naturelles, de la fabrication, du transport, de l'alimentation et des services financiers.

La lettre n'évoque pas précisément la menace d'un retrait des États-Unis de l'ALÉNA, mais souligne que la diversification du commerce est plus importante que jamais.

M. Manley a rejeté les inquiétudes du gouvernement Trudeau qui disait se préoccuper des conséquences des clauses portant sur l'automobile du PTP sur les chapitres de l'ALÉNA en cours de négociations. Les États-Unis veulent augmenter le contenu américain et nord-américain dans les voitures - ce qu'on appelle communément les règles d'origine.

«Bien franchement, leurs inquiétudes n'ont pas été clairement articulées. Si ce sont les règles d'origine, il est difficile de comprendre ce qu'est le problème. Les règles d'origine du PTP n'ont aucun lien avec les règles d'origine de l'ALÉNA», a-t-il laissé tomber.

«La menace au secteur automobile n'est pas le PTP, c'est la fin de l'ALÉNA.»

Un porte-parole du ministre du Commerce international François-Philippe Champagne affirme que le gouvernement «redouble» d'efforts pour discuter avec les parties intéressées pour s'assurer que le Canada obtienne la meilleure entente possible au sujet du PTP.

«La région Asie-Pacifique représente une occasion sans pareille de diversifier nos relations commerciales, assurer plus d'investissements et créer de bons emplois à la maison», a déclaré Joe Pickerill.

John Manley dit être retourné récemment au Japon, où des représentants gouvernementaux lui ont signifié qu'ils souhaitaient toujours l'adhésion du Canada au PTP.

«J'ai entendu beaucoup là-bas, au gouvernement, comment ils étaient surpris de ce qui s'est passé à Danang, et aussi, bien clairement: »Vous pouvez faire cela une fois, mais pas deux fois«», a-t-il indiqué.

Le Japon, qui est le quatrième partenaire commercial en importance au Canada, a toujours refusé de signer un accord de libre-échange bilatéral, car il estime que le PTP sert mieux ses intérêts.

«La notion d'un (accord) bilatéral avec le Japon, oubliez cela. C'est maintenant, c'est vraiment urgent», a-t-il affirmé.