Ne soyez pas naïfs, avertit le consul général du Mexique d'Austin au Texas. Si le président américain Donald Trump écarte le Mexique de l'ALENA ou envoie l'accord à la déchiqueteuse, le Canada en subira aussi les contrecoups puisqu'un tel geste perturberait les chaînes d'approvisionnement hautement intégrées entre les trois pays, estime-t-il.

Carlos Gonzales Gutiérrez croit qu'il est dans l'intérêt national du Canada de plaider en faveur du maintien de cet accord de libre-échange tripartite.

Jusqu'à maintenant, le président américain a surtout visé le Mexique lorsqu'il a fait savoir qu'il allait renégocier l'Accord pour le rendre plus avantageux pour les Américains - et que sinon, il allait s'en débarrasser.

En ce qui concerne le Canada, M. Trump a plutôt déclaré à la mi-février qu'il ferait des «ajustements mineurs», sans préciser davantage  ses intentions. Mais mardi, des sénateurs américains ont fait valoir qu'ils s'attendent à une approche plus dure envers le Canada dans le cadre des négociations, notamment en ce qui a trait à la gestion de l'offre pour la volaille et les produits laitiers.

Mais peu importe l'étendue des négociations touchant le Canada, le pays sera affecté négativement si le Mexique est mis de côté, a dit M. Gonzales Gutiérrez, rencontré par La Presse canadienne à Austin au Texas.

Il fait valoir que certaines industries sont particulièrement intégrées entre le Canada, les États-Unis et le Mexique. Il cite surtout l'industrie automobile: dans ce secteur «n'importe quel dérèglement va toucher le Canada».

«Je ne suis pas un expert, mais je sais que nos amis Canadiens ne devraient pas être naïfs de penser que la perturbation des chaînes d'approvisionnement entre le Mexique et les États-Unis ne va pas affecter le Canada», a-t-il ajouté.

Il est dans l'intérêt du Canada de protéger l'intégration nord-américaine, plaide-t-il, et même de l'accentuer. «Nous ne sommes pas des compétiteurs, nous sommes des partenaires», qui tentent ensemble de devenir plus concurrentiels dans le monde, a-t-il martelé lors de la rencontre.

De fausses croyances

Le consul déplore avoir entendu à répétition que l'ALENA est responsable de la perte d'emplois aux États-Unis. «C'est erroné, avance-t-il. Si certains emplois ont été perdus en faveur du Mexique, bien plus l'ont été en raison de l'automatisation.»

Et puis, soutient-il, beaucoup d'emplois ont été créés parce que l'ALENA a été mis en place en 1994.

Le consul déploie ainsi de multiples efforts pour faire la promotion des bénéfices de l'ALENA et réfuter les mythes qui circulent à son sujet.

Un panel a d'ailleurs été organisé dans le cadre du festival annuel South by SouthWest (SXSW), à Austin, portant sur l'importance de l'accord tripartite, intitulé «L'ALENA à l'ère de Trump».

Le consul souhaite que la communauté d'affaires et les Texans en général réalisent l'importance de cette entente commerciale pour leur État, qui est le premier partenaire commercial du Mexique et le premier marché des exportations du Texas, a-t-il fait valoir lors de l'entrevue. Quelque 200 milliards $ d'échanges commerciaux ont lieu entre les deux partenaires chaque année, ce qui est le double des échanges entre les États-Unis et la Grande-Bretagne, indique-t-il.

«Le Texas devrait être le champion numéro 1 de l'ALENA», dit-il.

Les canaux de communications pour les négociations sont-ils ouverts entre le Mexique et les États-Unis? «Nous sommes ouverts et nous allons toujours privilégier le dialogue. Nous sommes prêts à négocier tout ce qui sera sur la table», a répondu Carlos Gonzales Gutiérrez.

«Mais nous n'allons rien signer qui serait contraire aux intérêts des Mexicains et du Mexique», a-t-il ajouté.

Aucune date n'a encore été déterminée pour une rencontre entre Donald Trump et le président mexicain Enrique Pena Nieto. Une visite prévue pour la fin du mois de janvier avait été annulée quelques jours avant sa tenue en raison des tensions renouvelées au sujet de la construction d'un mur entre les deux pays - une idée à laquelle le président Trump semble tenir dur comme fer.

Quant à savoir si les canaux de communication sont autant ouverts du côté américain, M. Gonzales Gutiérrez a répondu en souriant: «Ça, je ne peux pas le dire».