La place financière de Paris a mené lundi une opération séduction à Londres, en se gardant de toute hostilité envers la City mais bien décidée à se battre pour récupérer activités et emplois menacés par le Brexit.

La France a joué la carte de l'unité pour cette journée dans la capitale britannique, l'association de défense de la place financière, Paris Europlace, ayant fait le voyage outre-Manche, en compagnie notamment de Valérie Pécresse, présidente de la région Ile-de-France et Jean-Louis Missika, adjoint à la Mairie de Paris.

«Le Brexit pose des problèmes mais nous sommes là pour aider à les résoudre. Nous sommes là pour offrir des solutions», a expliqué Gérard Mestrallet, président de l'association Paris Europlace, dans un entretien accordé à l'AFP.

«Il y a 20 ou 30 000 salariés de la City potentiellement concernés et je me bats pour qu'ils viennent chez nous», a-t-il martelé.

La délégation française a tenté de convaincre quelque 80 responsables d'importants groupes financiers réunis dans un grand hôtel de la capitale londonienne, que ce soit des banques, des gérants d'actifs et des fonds d'investissement.

«L'accueil est très bon avec un nombre de participants très important et au-delà de nos espérances. Cela montre qu'il y a un intérêt pour Paris», a noté M. Mestrallet, par ailleurs président du conseil d'administration du géant français de l'énergie Engie.

Le «Brexit dur» vers lequel semble se diriger le gouvernement britannique se traduira vraisemblablement par la perte du passeport financier qui permet aux institutions basées au Royaume-Uni de proposer depuis Londres leurs services dans toute l'Europe.

La plupart des grandes banques ont ainsi prévenu qu'elles réfléchissaient à déplacer certaines activités et les emplois qui vont avec sur le continent. La britannique HSBC a notamment indiqué que 1000 emplois pourraient être transférés à Paris.

«Concurrence féroce»

«Nous ne voulons pas apparaître hostiles à Londres. Paris est en compétition non pas avec Londres mais avec Francfort, Luxembourg, Amsterdam ou Dublin», a expliqué M. Mestrallet.

Valérie Pécresse a de son côté évoqué lors d'une conférence de presse une «concurrence féroce» entre capitales, expliquant que «pour les entreprises choisissant d'être dans l'Union européenne, la région parisienne est le choix de la stabilité».

Paris fait valoir ses atouts de principale ville européenne après Londres, dotée d'importantes infrastructures que ce soit dans les transports ou l'immobilier avec La Défense. Sur le plan financier, Paris Europlace rappelle la présence en France de quelques-unes des plus grandes banques mondiales sans compter une industrie de la gestion d'actifs de premier plan.

M. Mestrallet s'est également voulu rassurant sur le plan fiscal, toujours très regardé par les investisseurs.

«Des progrès ont été faits post-Brexit, notamment sur l'impôt sur les sociétés», qui va baisser dans les prochaines années ou encore concernant les «impatriés», salariés étrangers venant travailler en France qui bénéficieront d'un régime fiscal très avantageux.

Côté français, la plus grande incertitude à court terme est toutefois la prochaine élection présidentielle, la montée de Marine Le Pen et les déboires de François Fillon étant de nature à nourrir l'attentisme des décideurs économiques y compris à Londres.

Concernant les déplacements d'activités liées au Brexit, «j'imagine que certains prendront leur décision après l'élection présidentielle pour s'assurer que la France soit business-friendly (accueillante pour le monde des affaires, NDLR)», a estimé M. Mestrallet, ajoutant que plus largement «la plupart ne veulent pas attendre la fin des négociations» avec l'Union européenne.

Le coup d'envoi des discussions devrait être donné d'ici fin mars par le Royaume-Uni. Elles devraient durer deux ans.

D'ici là, Paris compte bien mettre toutes les chances de son côté. Paris Europlace a d'ores et déjà annoncé qu'il reviendrait à Londres, mais sans oublier d'aller à la rencontre des grands groupes financiers à travers le monde.

«Nous allons aller à New York fin avril et en Chine en mai et puis nous allons continuer», a lancé M. Mestrallet.