À moins d'un mois du référendum sur l'appartenance à l'Union européenne, la place financière et les banques de Londres se préparent fébrilement, mais avec discrétion au séisme d'un éventuel «Brexit».

Du «Cornichon» aux courbes futuristes au très classique bâtiment de la Banque d'Angleterre au coeur de la City, jusqu'aux gratte-ciel des banques Barclays et HSBC du quartier d'affaires de Canary Wharf, la même question résonne sous toutes ses formes: quid en cas de Brexit ?

Banques, assurances, Bourses d'échanges, les acteurs de ce vaste centre financier se préparent comme ils peuvent aux conséquences d'une éventuelle sortie de l'UE (Brexit) après le référendum du 23 juin qui aurait des retombées encore imprévisibles, mais à coup sûr massives.

«Nous avons des plans de secours sur lesquels nous travaillons très dur», a souligné John Nelson, le président du marché de l'assurance du Lloyd's, lors d'une interview récente à l'AFP. Mais comme ses homologues financiers, M. Nelson rechigne à préciser comment s'adapterait le Lloyd's à cette nouvelle donne, se bornant à affirmer qu'il a préparé «une boîte à outils appropriée».

Volatilité accrue sur les marchés, conditions plus difficiles d'accès au marché unique européen, chamboulement de la régulation entourant les affaires, les répercussions d'un éventuel vote pro-Brexit sont attendues nombreuses à court et à long terme, aussi le secteur doit-il se préparer sur plusieurs fronts.

«Le principal outil à disposition consiste à accumuler des réserves - du liquide, des titres financiers de qualité, des biens servant de garanties - qui ne seraient pas affectées par un Brexit», explique Anastasia Nesvetailova, professeur d'économie à la City University London.

Neutres... jusqu'à un certain point

La Banque d'Angleterre a cherché à calmer toute inquiétude autour d'un éventuel brutal assèchement du crédit comparable à celui de la crise financière de 2008-2009, en annonçant des injections de liquidité dans le système financier dans les semaines entourant le référendum.

Mais les entreprises n'en mettent pas moins à l'épreuve leur capacité de réaction face à des scénarios choisis volontairement pessimistes afin de réduire les risques. «Cela comprend des tests de résistance sur leurs fonds propres, de garantir la solidité de leur bilan face à une crise massive et prolongée de liquidités et de prévoir les besoins en terme de personnel dans le cas de délocalisation d'activité en dehors de Londres», détaille Mme Nesvetailova.

La capitale pourrait perdre une centaine de milliers d'emplois dans le secteur de la finance, soit un sur sept, en cas de Brexit, d'après la société de lobbying TheCityUK.

Peu des acteurs de la City ont publié des prévisions en la matière, mais HSBC, la première banque britannique et européenne, a prévenu qu'elle pourrait déplacer un millier d'emplois de Londres vers Paris tandis que l'allemande Deutsche Bank a confirmé étudier la question d'éventuels redéploiements d'effectifs en cas de Brexit.

Globalement toutefois, les sociétés financières ont tendance à ne pas crier sur les toits leurs projets.

«Nous passerions en revue la manière dont nous travaillons de façon à servir nos clients du mieux possible» en cas de départ de l'UE, se borne ainsi à expliquer Alison Rose, directrice générale des activités de banques commerciale et privée de Royal Bank of Scotland (RBS).

Quelques géants de la City, comme Barclays, ont pris position clairement pour le maintien et contre le Brexit, mais la plupart préfèrent rester officiellement neutres, afin d'éviter tout retour de bâton des partisans du départ prompts à pointer une conspiration des lobbies financiers pro-européens.

Certaines firmes rusent néanmoins, à l'instar de RBS qui, sans prendre de position officielle, a prévenu qu'un divorce avec Bruxelles comporterait un certain nombre de «risques».