Si la Chine a vu sa croissance ralentir de nouveau au premier trimestre, la deuxième économie mondiale a cependant repris quelques couleurs en mars, avec notamment une vigoureuse accélération de sa production industrielle. Mais l'embellie reste fragile.

Sur les trois premiers mois de l'année, le Produit intérieur brut (PIB) du géant asiatique a progressé de 6,7 % sur un an, après une hausse de 6,8 % au quatrième trimestre 2015, a annoncé vendredi le Bureau national des statistiques (BNS).

Ce chiffre gouvernemental, à la fiabilité parfois contestée, correspond à la prévision médiane du panel d'analystes interrogés par l'AFP. C'est la plus faible croissance trimestrielle du pays depuis sept ans.

Pour autant, « la décélération apparaît moins violente que ce que beaucoup redoutaient », a commenté Louis Kuijs, analyste du cabinet Oxford Economics.

« Il semblerait que la croissance chinoise a atteint un plancher » momentané, abondait Julian Evans-Pritchard, du cabinet Capital Economics, estimant que les mesures de relance gouvernementales « ont permis d'éviter un assombrissement plus grave encore ».

La croissance chinoise était tombée en 2015 à 6,9 %, au plus bas depuis un quart de siècle, le pays poursuivant sa douloureuse transition vers un modèle plus orienté vers le marché, la consommation et les services.

« Déséquilibres »

Mais la salve d'indicateurs mensuels également publiés vendredi témoigne d'un sursaut très marqué de l'activité.

La production industrielle a ainsi grimpé de 6,8 % sur un an en mars, une accélération vigoureuse après une hausse de seulement 5,4 % en janvier-février.

Les ventes de détail, baromètre de la consommation des ménages, ont elles gonflé de 10,5 % en mars, plus fortement qu'attendu.

Et le rééquilibrage économique se poursuit: le secteur des services a représenté 56,9 % du PIB au premier trimestre, contre 54,9 % au trimestre précédent.

Les signaux encourageants se sont multipliés: rebond inattendu de l'activité manufacturière, remontée spectaculaire des exportations en mars (+11,5 %) après huit mois de plongeon consécutifs, ou encore nette reprise des prix des logements neufs.

« Les mesures de soutien gouvernementales ont donné un coup de fouet à l'économie réelle, et la consommation est restée solide », observait M. Kuijs.

Si les assouplissements monétaires répétés contribuent à un gonflement du crédit, le régime a également musclé ses efforts de relance budgétaire, via rabais fiscaux et dépenses publiques accrues.

La bonne tenue des statistiques « atteste de la capacité des autorités » à « doper le taux de croissance économique à court terme », soulignait Marie Diron, vice-présidente de l'agence de notation Moody's.

Mais cela « pourrait encore accentuer les déséquilibres de long terme », s'inquiète-t-elle, en pointant « la très forte hausse » des investissements réalisés par les groupes étatiques, souvent peu rentables et déjà lourdement endettés.

Inévitables mesures de relance

Les nuages ne se sont pas dissipés d'un coup, confirme Yang Zhao, de la banque Nomura, s'alarmant de la persistance « de difficultés structurelles ».

Les industries lourdes - sidérurgie et secteur minier surtout -, restent plombées par une demande terne, d'énormes surcapacités et un endettement colossal. Pékin s'est engagé à réduire ces surcapacités, au prix d'importantes suppressions d'emplois.

Les dettes des gouvernements locaux et groupes étatiques restent une bombe à retardement, et la montée des créances douteuses et des risques de défauts de paiement fragilise le secteur financier.

Quant au sursaut de l'immobilier, « on ne s'attend pas à ce qu'il conduise à une reprise durable [du secteur] », prévenait Louis Kuijs.

Enfin, l'essor des services devrait faire les frais du déclin du secteur financier qui, après s'être envolé au premier semestre 2015, s'était effondré dans le sillage de la spectaculaire débâcle boursière de l'été dernier.

Pékin s'est fixé comme objectif une croissance économique annuelle comprise entre 6,5 % et 7 %.

Mais pour y parvenir, il sera forcé de renforcer son arsenal de mesures de relance, notamment les investissements dans les infrastructures, estimait M. Kuijs.

La politique monétaire, de son côté, devrait rester accommodante: Nomura table, d'ici à fin 2016, sur trois réductions supplémentaires des ratios de réserves obligatoires des banques, et une nouvelle baisse des taux d'intérêt de la banque centrale.