La patronne du FMI Christine Lagarde a décrit jeudi la «dure réalité» qui s'impose aux économies émergentes et fait part de ses «inquiétudes» sur la corruption en Ukraine et la réforme des retraites en Grèce.

Dans le sillage du géant chinois et de la chute des cours des matières premières, les économies émergentes marquent le pas et font face à une «nouvelle et dure réalité», a rappelé la directrice générale dans un discours à l'Université du Maryland.

«Les taux de croissance sont bas, les flux de capitaux se sont inversés et les perspectives à moyen terme se sont considérablement détériorées», a énuméré la patronne du Fonds monétaire international.

La Chine a connu en 2015 sa croissance la plus faible en un quart de siècle tandis que le Brésil et la Russie s'enfoncent dans la récession.

«Nous ne nous attendons pas un atterrissage brutal de la Chine», a toutefois précisé Mme Lagarde lors d'une conférence de presse en ligne, au moment où la deuxième puissance économique mondiale est engagée dans une difficile transition de son modèle de croissance.

Le ralentissement des économies émergentes risque toutefois d'être lourd de conséquences, a prévenu Mme Lagarde. «Cela veut dire que des millions de pauvres vont trouver plus difficile d'aller de l'avant et que des membres de classes moyennes qui viennent tout juste d'émerger voient leurs attentes déçues», a-t-elle souligné.

L'impact sera économique mais également social, selon la dirigeante, évoquant un «risque d'inégalités croissantes», de «protectionnisme» et de «populisme».

Inquiétudes sur l'Ukraine 

Pour tenter de sortir de cette spirale, la dirigeante conseille notamment aux pays exportateurs de matières premières de diversifier leurs revenus afin de rendre les ajustements budgétaires à venir «moins douloureux».

Mme Lagarde dit toutefois s'attendre à ce qu'un nombre croissant de pays, notamment ceux exportateurs de pétrole, soient contraints de frapper à la porte du FMI pour demander une aide financière. «Nous sommes prêts à le faire,» a-t-elle dit.

Pendant sa conférence de presse en ligne, où les questions des journalistes devaient être soumises à l'avance, Mme Lagarde a par ailleurs fait part de son «inquiétude» sur l'Ukraine, un des pays sous assistance financière du FMI.

Le ministre ukrainien de l'Économie, Aivaras Abromavicius, a claqué la porte du gouvernement mercredi en dénonçant des tentatives d'imposer des personnes «douteuses» dans son équipe.

«Si les allégations faites lors sa démission sont exactes, c'est un signe clair que les mesures anti-corruption promises par le gouvernement ne fonctionnent pas encore», a déclaré Mme Lagarde, assurant que «beaucoup de travail» restait sur la corruption.

La dirigeante a également évoqué la situation en Grèce où la réforme des retraites a provoqué une grève générale dans le pays jeudi mais reste insuffisante aux yeux des créanciers du pays, dont le FMI.

«Nous ne voulons pas de mesures draconiennes en Grèce qui a déjà fait beaucoup de sacrifices», a-t-elle assuré tout en indiquant que le système des retraites était actuellement «intenable» et devait être réformé «profondément».

Enfin, la dirigeante a salué le changement de cap économique et politique en Argentine, un pays avec lequel le FMI est en froid depuis le défaut de paiement de 2001.

Mme Lagarde s'est dite «encouragée» par le fait que le nouveau gouvernement argentin ait entamé des négociations sur sa dette avec les fonds «vautours» qui poursuivent le pays en justice.

Une issue «juste et équilibrée» à ce long litige permettrait de faciliter le retour de l'Argentine sur les marchés financiers, selon Mme Lagarde.