Le président chinois Xi Jinping a fixé mardi le cap de la deuxième économie mondiale pour les cinq prochaines années, en affirmant qu'une croissance annuelle de 6,5% serait suffisante pour atteindre l'objectif d'un doublement du revenu par habitant sur la décennie 2010-2020.

Le rythme de croissance annuel chinois «ne devra pas être inférieur» à 6,5% pour que se concrétise le doublement du produit intérieur brut (PIB) du pays entre 2010 et 2020, a déclaré le chef d'État, cité au discours indirect par l'agence officielle Chine nouvelle, et pour que soit également multiplié par deux, sur la même période, le revenu moyen par tête dans le pays, à la fois en zones rurales et en territoires urbains.

Ces deux objectifs avaient été confirmés jeudi à l'issue d'une réunion en plénum des hauts responsables du Parti communiste chinois (PCC), destinée à établir le 13e plan quinquennal qui définira les grandes lignes politico-économiques pour la période 2016-2020.

Ce «niveau plancher» de 6,5%, rendu public pour la première fois, s'établit sensiblement en deçà de la cible d'«environ 7%» que s'est fixée Pékin pour l'année 2015.

La croissance du géant asiatique a officiellement ralenti à 6,9% au troisième trimestre, sa pire performance trimestrielle depuis 2009, et devrait tomber pour l'ensemble de l'année au plus bas depuis un quart de siècle, ce alors que nombre d'experts jugent les statistiques gouvernementales surévaluées.

«Qualité de la croissance»

«Au cours des cinq prochaines années, le développement de la Chine ne doit pas uniquement se concentrer sur le rythme de la croissance, mais également (...) de façon encore plus importante, sur la qualité de la croissance», a insisté Xi Jinping.

Xu Shaoshi, président de la NDRC, l'agence de planification chinoise, a abondé en ce sens mardi: «Bien entendu, la rapidité de la croissance n'est pas le seul critère. En réalité, nous nous inquiétons davantage de l'emploi, des revenus des habitants et des prix», a-t-il plaidé lors d'une conférence de presse.

Autant de facteurs clefs pour préserver la stabilité sociale, une priorité du gouvernement.

Avec une croissance de 6,5%, estime le président chinois, le pays sera à même de tirer de la misère d'ici 2020 quelque 70 millions de Chinois en zones rurales qui vivaient fin 2014 sous le seuil de pauvreté, et de réduire les écarts de richesse galopants dans le pays, rapportait Chine nouvelle.

Pékin vante volontiers «la nouvelle normalité» d'une croissance économique ralentie mais plus durable, fruit de ses efforts pour rééquilibrer l'économie vers la consommation intérieure, les services et les nouvelles technologies, et ce alors que les piliers traditionnels de la croissance chinoise, dopée aux investissements, s'essoufflent de façon accélérée.

L'immobilier stagne après des années de surchauffe pour raison de marché saturé; le commerce extérieur s'enfonce sur fond de demande internationale terne et de compétitivité déclinante; la production industrielle ralentit fortement et le secteur est miné par les surcapacités.

Réformes structurelles sacrifiées?

Pékin reste certes soucieux de prévenir tout «atterrissage brutal» et multiplie les mesures de soutien pour stimuler l'activité, via des assouplissements monétaires répétés (six abaissements des taux directeurs en un an) et des efforts de relance budgétaire.

Pas certain que cela suffise: «On peut penser que le gouvernement se fixera un objectif de croissance annuelle entre 6,5% et 7%, mais c'est bien trop optimiste», a indiqué à l'AFP Hua Changchun, analyste de la banque Nomura.

Sa firme table sur une croissance de 6% seulement l'an prochain, pointant notamment du doigt la morosité du secteur immobilier.

De son côté, Liu Ligang, de la banque ANZ, anticipe une possible croissance de 6,4% en 2016 et de 6% en 2017, relevant des «obstacles structurels, comme le colossal endettement des groupes et gouvernements locaux».

«Si le gouvernement veut vraiment s'attaquer aux problèmes structurels, l'économie pourra rebondir de façon durable. Sinon, elle continuera de fléchir», tranche-t-il.

Or, pour plusieurs experts, si la Chine s'attache à se maintenir coûte que coûte au-dessus du plancher des 6,5%, cela pourrait être en sacrifiant les douloureuses réformes structurelles promises, nécessaires pour «rééquilibrer» son modèle économique.

Les grandes lignes du 13e plan quinquennal dévoilées mardi gardaient pour autant des accents réformistes, s'engageant notamment à parvenir à une libre convertibilité du yuan, encore étroitement encadrée, pour en intensifier l'usage à l'international. Mais sans livrer de détails ni de calendrier précis.