Les dirigeants sud-coréen, chinois et japonais se sont réunis dimanche pour leur premier sommet trilatéral en trois ans, mettant de côté les contentieux territoriaux et historiques pour se focaliser sur les questions commerciales.

Aucun accord particulier n'est attendu lors de ce rassemblement, mais sa tenue est en elle-même hautement symbolique au vu des sujets d'affrontements entre les trois pays.

L'économie devait être au coeur des discussions, au moment où Pékin, en plein ralentissement économique, souhaite dynamiser ses relations commerciales avec ses deux voisins.

Les trois devraient ainsi discuter d'un projet d'accord trilatéral de libre-échange, lequel viendrait concurrencer le traité de libre-échange transpacifique (TPP) mis en place par les États-Unis.

La question nord-coréenne sera également abordée lors de ce sommet qui intervient sur fond de tensions maritimes entre Pékin et Washington. Les trois capitales, y compris Pékin qui est le plus proche allié de Pyongyang, s'inquiètent fortement des ambitions nucléaires nord-coréennes.

Le triomphe de la «realpolitik» sautera encore plus aux yeux lundi quand la présidente sud-coréenne Park Geun-Hye rencontrera pour la première fois en face à face le premier ministre japonais Shinzo Abe.

Elle s'y était jusqu'alors toujours refusée en raison de différends remontant à la Seconde Guerre mondiale entre Séoul et Tokyo. Mais certains experts estiment que les États-Unis ont poussé en faveur d'un rapprochement entre Tokyo et Séoul, ses deux alliés militaires dans la zone.

C'est la brouille entre Séoul et Tokyo qui avait eu raison des réunions trilatérales, initialement annuelles.

«La Chine espère que cette réunion offrira aux trois pays une occasion de se pencher sur le passé et de trouver un moyen de dépasser les difficultés», déclarait récemment Hua Chunying, porte-parole du ministère chinois des Affaires étrangères.

Le sommet rassemble autour de la présidente sud-coréenne les premiers ministres japonais et chinois, Shinzo Abe et Li Keqiang.

Selon des experts de la région, la présence de Li, dont le profil est plus technocrate que celui du président chinois Xi Jinping, devrait contribuer à focaliser les discussions sur les questions économiques, plutôt que sur les sujets qui fâchent.

Tokyo et Séoul s'opposent notamment sur le sujet très sensible en Corée des femmes dites de «réconfort», ces dizaines de milliers d'Asiatiques enrôlées de force dans les bordels de l'armée impériale nippone pendant la Seconde Guerre mondiale.

Mme Park exigeait comme préalable à sa rencontre avec Shinzo Abe que Tokyo fasse amende honorable sur cette question. Une position intransigeante qui était très populaire dans son pays.

Les deux voisins s'opposent aussi sur la souveraineté d'îlots isolés en mer du Japon, les îles Dokdo, selon l'appellation coréenne, et les Takeshima selon l'appellation japonaise. Situées à mi-chemin entre les deux pays, ces îles sont contrôlées par la Corée du Sud, mais revendiquées par Tokyo.

Mais selon de nombreux experts, la brouille entre Tokyo et Séoul contrarie la Maison-Blanche, qui préférerait clairement voir ses deux alliés militaires se concentrer ensemble sur la réponse à apporter aux ambitions chinoises dans la région.

La Chine a également ses contentieux historiques avec le Japon depuis la Seconde Guerre mondiale. Et sur le plan territorial, Pékin se dispute avec Tokyo le contrôle de huit îlots inhabités en mer de Chine orientale appelés Senkaku en japonais et Diaoyu en chinois.

«Il y a beaucoup de contentieux, mais les trois dirigeants sont d'accord sur le fait qu'il faut les dépasser pour le moment», explique Kim Soung-Chul, spécialiste de la politique internationale à l'Institut Sejong de Séoul.