L'horizon de l'économie mondiale s'assombrit: le FMI a abaissé mardi ses prévisions de croissance économique en braquant un oeil inquiet sur le ralentissement chinois qui entraîne les pays émergents dans son sillage.

«Le Saint Graal d'une expansion mondiale robuste et synchronisée reste hors de portée», a résumé Maurice Obstfeld, le nouveau chef économiste du Fonds monétaire international qui tient son assemblée générale cette semaine à Lima.

Résultat: le produit intérieur brut (PIB) de la planète ne devrait plus progresser que de 3,1% cette année et de 3,6% en 2016, marquant à chaque fois un repli de 0,2 point par rapport aux précédentes estimations publiées il y a trois mois, indique le Fonds dans son nouveau rapport sur les perspectives mondiales.

Malgré la relative bonne santé des pays riches, États-Unis en tête, l'économie de la planète serait ainsi en passe de réaliser cette année sa plus mauvaise performance depuis la récession planétaire de 2009.

La dégradation concerne en premier lieu «les marchés émergents et les économies en développement», explique l'institution.

Ce diagnostic vient confirmer une tendance récente: les pays émergents se muent en boulets après avoir été les locomotives du globe pendant la crise financière de 2008-2009.

La Chine au plus bas depuis 25 ans

Les inquiétudes se concentrent tout particulièrement sur la Chine, dont le récent ralentissement économique a déjà plombé une cohorte de pays et devrait se confirmer en 2016 avec une croissance attendue de 6,3%, selon le FMI, au plus bas depuis vingt-cinq ans.

«Ce qui se passe en Chine a des répercussions sur la planète tout entière», a affirmé le chef économiste du FMI lors d'une conférence de presse.

D'après le FMI, le coup de mou de la deuxième puissance économique mondiale va ainsi se payer au prix fort chez des pays exportateurs de matières premières, notamment de métaux dont 50% de la production mondiale est absorbée par la Chine.

Ces pays «vont être dans le pétrin», a déclaré M. Obstfeld.

L'addition s'annonce sévère pour le Brésil, dont la récession devrait être deux fois plus forte que prévu jusque-là (-3,0% en 2015) ou l'Afrique sub-saharienne dont la croissance pourrait être amputée de 1,2 point par rapport à 2014 (3,8%).

Autre grande économie émergente, la Russie cumule, elle, le double handicap de produire de l'or noir et d'être visée par des sanctions occidentales pour son rôle dans la crise en Ukraine. Verdict du FMI: une récession de près de 4% cette année.

Un péril commun guette par ailleurs les pays émergents: le prochain changement de cap monétaire aux États-Unis qui pourrait accélérer la fuite de capitaux, au risque de les priver d'argent frais.

«La fin des taux d'intérêt proches de zéro risque d'augurer d'un resserrement supplémentaire des conditions de financement», soutient le FMI, qui a par ailleurs estimé que la marge de ma manoeuvre des pays émergents s'était «réduite».

Le Fonds s'est toutefois refusé cette fois à réitérer son appel à la banque centrale américaine (Fed) d'attendre la première moitié de l'année prochaine pour changer de cap.

«Cela pourrait arriver en 2015, cela pourrait arriver en 2016», a prudemment dit M. Obstfeld.

Risques persistants en Grèce

Après avoir été l'épicentre de la crise mondiale en 2008-2009, les pays riches semblent mieux lotis et peuvent s'appuyer sur une reprise «plus avancée» aux États-Unis et au Royaume-Uni, souligne le Fonds.

Mais des risques persistent dans la zone euro.

Le Fonds maintient quasi inchangées ses prévisions dans la région mais met en garde contre les aléas de la crise grecque.

«Les risques de contagion (liés à la Grèce) sont plus faibles que plus tôt dans l'année mais restent un sujet d'inquiétudes», note le FMI, qui doit bientôt décider s'il participera au troisième plan d'aide accordé à la Grèce.

L'institution relève également que les «risques géopolitiques» restent élevés et a pour la première fois évoqué l'impact contrasté de la crise des réfugiés sur l'économie en Europe.

«Gérer le flux de réfugiés pèsera sans aucun doute sur les budgets dans certains pays», a ainsi détaillé M. Obstfeld, tout en assurant que leur intégration sur le marché du travail sera au final «positive» pour la croissance.