Le géant laitier Danone propose aux producteurs laitiers qui approvisionnent ses cinq usines françaises de prendre en compte leurs coûts de production dans les prix du lait, une nouvelle formule qui s'accompagnerait cependant d'une baisse des volumes d'achats à certains éleveurs.

«On vient d'entamer des discussions avec les organisations de producteurs pour leur présenter des propositions concrètes: faire évoluer notre formule de prix», a expliqué à l'AFP le directeur général France de la division des produits frais Olivier Delaméa.

Le calcul du prix du lait acheté par Danone est aujourd'hui basé sur des facteurs historiques d'une part et des indicateurs de marché (le beurre et la poudre) d'autre part. Danone propose d'y introduire progressivement à partir d'octobre les coûts de production des éleveurs afin d'amoindrir l'effet de la volatilité des prix.

Les producteurs laitiers traversent une grave crise due à une chute des marchés mondiaux qui ont amené les prix du lait français en dessous du coût de production des éleveurs. Intégrer ces coûts dans le prix peut leur permettre à court terme de ne plus perdre d'argent. Et si les cours repartaient à la hausse, cela permet à Danone de ne pas voir les prix exploser.

«Il y a aujourd'hui une volonté de l'entreprise d'essayer de trouver une sortie pour éviter d'avoir demain des gens devant les grilles de l'entreprise», souligne Luc Smessaert vice-président de la FNSEA et producteur de lait dans l'Oise.

Selon M. Smessaert, les coûts de production avec une rémunération de l'éleveur sont environ de 350 à 360 euros (environ 540 $ CAN) la tonne (1000 litres).

«Danone n'est pas prêt à mettre 350 euros la tonne demain ou d'ici la fin de l'année, mais je pense que c'est plutôt une bonne chose de faire un mix et commencer à regarder comment gérer la volatilité», ajoute-t-il.

«Sur les 8 premiers mois de l'année, on a en moyenne été payé 310 euros (468 $ CAN) la tonne, ce qui fait une perte de 40 euros (60 $ CAN) la tonne. Sur un quota moyen de 400 000 litres, ça représente 16 000 euros (24 000 $ CAN) net de chiffre d'affaires, ce qui correspond aux revenus de l'éleveur», selon le vice-président de la FNSEA.

Cependant, Danone a précisé que cette «proposition a deux aspects: on propose (aux éleveurs, NDLR) d'introduire progressivement à partir du 1er octobre et sur les trois prochaines années» les coûts de production dans le calcul du prix, «et dans le même temps on discute aussi avec eux d'un ajustement de nos besoins pour avoir le lait dont on a besoin dans nos usines», a indiqué M. Delaméa. Ce qui pourrait conduire à diminuer dans certains cas les volumes d'achats.

Pour M. Smessaert, «il ne faut pas non plus que Danone mette trop de conditions».

La perspective de voir baisser les volumes achetés par Danone «est problématique», assure pour sa part un autre éleveur qui souligne qu'on n'en est qu'au début des discussions.

Selon le directeur général des produits frais de Danone France, cette demande s'explique, car «on est sur un marché de l'ultra frais (yogourts, beurre et crèmes, NDLR) qui est baissier en volume». Il faut donc ajuster les besoins en lait «en fonction de ce qu'on est capable de valoriser, de produire et de vendre».

Ce ne sera pas une baisse générale, car Danone indique qu'il compte ajuster ses besoins «en fonction des régions, des usines, et des gammes».

Le géant laitier ne donne pas de chiffres sur cette éventuelle baisse des achats de lait, mais indique que le marché des produits frais est en repli de 2 % chaque année depuis 4 ans.

Danone représente 3,5% de la collecte de lait en France, soit 1 milliard de litres de lait récolté chaque année auprès de 2800 éleveurs.