La croissance chinoise s'est stabilisée au deuxième trimestre, à la faveur d'une accélération en juin de la production industrielle et des ventes de détail, mais cette embellie, favorisée par les mesures de soutien de Pékin et dopée par l'envolée boursière, reste fragile.

Le Produit intérieur brut (PIB) chinois a progressé de 7% sur les trois mois d'avril à juin, au-delà de la prévision médiane de quatorze experts interrogés par l'AFP, qui anticipaient au contraire un ralentissement à +6,9%.

La deuxième économie mondiale a enregistré en 2014, avec une croissance de 7,4%, sa plus faible performance depuis près d'un quart de siècle, et Pékin s'est fixé pour 2015 un objectif d'«environ 7%».

La croissance meilleure qu'attendu au deuxième trimestre «a pu être alimentée en partie par les gains du secteur financier, alors que s'envolaient les volumes d'échanges en Bourse», commentait Yang Zhao, économiste chez Nomura. «Mais ce soutien pourrait vite s'évaporer».

L'engouement effréné pour la Bourse a nourri une véritable bulle, avant un effondrement spectaculaire à partir de mi-juin, la Bourse de Shanghai dégringolant de 30% en trois semaines.

Certes, «le PIB reflète l'emballement du secteur financier, qui a fait long feu», mais «il y a également des flots d'indicateurs positifs sur l'économie dans son ensemble», tempérait Julian Evans-Pritchard, du cabinet Capital Economics.

Et même si le chiffre officiel de la croissance est «presque certainement» surévalué par rapport à la réalité, «il y a de bonnes raisons de croire à une véritable stabilisation de l'activité», assurait-il.

Reprise «tortueuse»

Le Bureau national des statistiques (BNS) a dévoilé mercredi une nouvelle accélération de la production industrielle en juin, avec une progression de 6,8% sur un an contre +6,1% en mai.

À rebours du ralentissement à +6% que prédisaient les économistes interrogés par l'agence Bloomberg.

Les ventes de détail, baromètre de la consommation des ménages, ont elles grimpé de 10,6% sur un an le mois dernier. Là encore, mieux qu'en mai et au-delà de la prévision médiane des experts (+10,2%).

«Les principaux indicateurs montrent que la croissance s'est stabilisée et est prête à accélérer, avec une dynamique renforcée», se réjouissait Sheng Laiyun, porte-parole du BNS.

Pour autant, même les autorités se montraient prudentes: «Il faut être conscient que la demande intérieure et internationale pâtit toujours d'un environnement difficile, et que la reprise économique mondiale est lente et tortueuse», avertissait M. Sheng.

De fait, si les exportations chinoises ont timidement rebondi en juin (+2,1% sur un an), les importations continuaient de s'enfoncer, plongeant de 6,7%, signe d'une consommation intérieure morose.

Avec une chute de presque 7% du commerce extérieur au premier semestre, c'est un traditionnel pilier de croissance qui s'effrite.

Quant à l'activité manufacturière chinoise, elle s'est encore contractée le mois dernier, selon l'indicateur PMI de référence publié par HSBC.

Confiance défaillante

La banque centrale chinoise (PBOC) n'a eu de cesse de multiplier les assouplissements monétaires, abaissant à quatre reprises depuis novembre ses taux d'intérêt tout en réduisant toujours davantage les ratios de réserves obligatoires imposés aux banques pour les inciter à élargir leurs prêts.

Pékin s'est par ailleurs employé à réduire la pression de l'endettement des gouvernements locaux. Autant de mesures qui ont pu contribuer au sursaut de l'économie en juin.

Pour autant, «les indicateurs d'activité (sur le trimestre) restent assez décevants», estimait Li-Gang Liu, analyste de la banque ANZ.

Quant aux investissements en capital fixe (finançant des travaux d'infrastructure), ils ont gonflé de 11,4% au premier semestre selon le BNS: «C'est très en dessous de l'objectif officiel de +15% sur l'année», notait M. Liu, pointant la faiblesse des investissements dans un secteur immobilier atone.

«Alors que les risques de déflation demeurent élevés et que la confiance générale s'est brutalement détériorée, assommée par le krach boursier, la PBOC devra continuer à se montrer accommodante», jugeait-il.

Plusieurs analystes s'attendent d'ici à décembre à une baisse supplémentaire des taux d'intérêt, et à une nouvelle coupe, voire deux, dans les ratios de réserves obligatoires des banques.

Pékin vante la «nouvelle norme» d'une croissance chinoise ralentie et ses efforts de rééquilibrage au profit de la consommation, des services et du secteur privé, mais les autorités s'efforcent ouvertement de prévenir tout atterrissage brutal et de préserver l'emploi.