Les banques ont baissé leurs rideaux, les commerçants guettent les clients et leurs employés espèrent être payés... Lundi, avec la mise en place d'un contrôle des capitaux, une semaine inédite a commencé en Grèce, où l'économie est traditionnellement basée sur l'argent liquide.

«Demain c'est le jour de la paye. Mais maintenant les banques sont fermées et le patron n'a pas d'argent...Comment on va faire? Il faut qu'on paie nos factures», s'alarme une jeune vendeuse de tissus, Sofia Chronopoulos.

Comme elle, nombreux étaient ceux qui se demandaient comment gérer la semaine, alors que les retraits sont limités à 60 euros par jour jusqu'au 7 juillet et que les banques resteront fermées, une décision prise par le gouvernement pour empêcher l'effondrement du système financier.

Manos, quinquagénaire, venu retirer les 60 euros auxquels il a droit, s'énerve contre le gouvernement: «quand on est dans une famille, il faut respecter ses règles. On est dans la famille européenne, on ne peut pas se permettre de partir quand on veut».

Depuis samedi, et l'annonce d'un référendum sur les propositions des créanciers, qui met en péril la perspective d'un accord, la population a mis à sec la plupart des appareils en tentant de récupérer quelques économies.

«Il n'y a pas d'argent, j'ai essayé plein d'ATM» (distributeurs), paniquait Theodoros Contos, un livreur de 38 ans.

La Grèce est un des pays européens où l'usage de la carte bancaire, qui reste théoriquement acceptée dans les commerces durant cette semaine exceptionnelle, est le moins répandu. Certaines personnes âgées n'en ont pas et vont chercher chaque mois leur retraite à la banque.

«Je n'ai pas pu retirer ma retraite aujourd'hui. J'espère que demain, je vais pouvoir le faire normalement» témoignait Kostas Makriniotis, 61 ans.

Selon l'ANA, l'agence de presse grecque, 850 établissements seront ouverts jeudi pour permettre aux retraités qui n'ont pas de cartes bancaires de retirer leur retraite.

Prix bradés

Pour les commerçants, la crainte, c'était de voir disparaître leurs clients. Nikos Gyallitsis, propriétaire d'un café dans le centre-ville, escompte une baisse de 50% de son chiffre d'affaires cette semaine: «les gens vont garder leur argent pour la nourriture et l'essence».

«Pour faire du magasinage, tu dois être heureux, avoir confiance et là, on ne sait pas ce qui va se passer demain», analyse-t-il.

À Athènes, les transports en commun seront gratuits jusqu'à la réouverture des banques, sans doute pour répondre à l'afflux dans les stations-service ce week-end.

Pour faire venir les clients coûte que coûte dans sa boutique de vêtements pour homme, Panagiotis Vergetis, a décidé de tout brader à  -30%: «j'ai besoin d'argent, j'espère qu'ils vont venir et acheter», confie le jeune homme.

Le gouvernement a précisé que les touristes et les personnes possédant une carte de crédit émise dans un pays étranger ne seraient pas concernés par les mesures de limitation des retraits.

Mais plusieurs pays ont recommandé à leurs ressortissants désireux de voyager en Grèce d'emporter assez d'argent liquide pour couvrir leurs dépenses.

Michele Ammann, Suisse de 48 ans, a emporté beaucoup de liquide et contrôle ses dépenses «pour être sûr de ne pas manquer».

«On a emporté plus d'argent que nous le ferions habituellement», témoigne aussi Marina Jestin, une Française en vacances avec son mari et son fils pour trois jours. «Nos amis en France sont inquiets pour nous, ils craignent que les Grecs ne deviennent plus agressifs ou violents au fur et à mesure que l'argent vient à manquer».

Anastasia, qui tient une boutique de chaussures, n'a pas assez d'argent en caisse pour payer ses employés, mais a décidé de ne pas rejoindre les longues files d'attente devant les distributeurs: «je crois que cette attitude rend juste le problème plus grave», considère-t-elle, «c'est important de rester calme».