On a l'habitude de dire : ce produit est fabriqué au Canada. Désormais, il faut plutôt chercher si la marchandise en question est fabriquée par le Canada.

La formule est de Benoit Daigneault, PDG d'Exportation et développement Canada, qui lançait mercredi la séance plénière de la Conférence de Montréal portant sur la chaîne de valeur dans une économie mondialisée.

Comme le commerce transfrontalier est organisé avant tout par les grandes sociétés transnationales, il obéit à des règles différentes de celles d'autrefois qui survivent surtout pour les exploitants de richesses naturelles.

L'entreprise exportatrice est beaucoup moins aujourd'hui celle qui vend un produit fini à des consommateurs ou à des grossistes étrangers. Elle fait plutôt partie d'une chaîne mondiale d'approvisionnements. Ses fournisseurs lui sont parfois imposés par une entreprise qui agit elle-même comme la sous-traitante d'une de plus grande taille qu'elle.

« Proctor & Gamble compte 125 000 PME de par le monde comme fournisseurs, Microsoft, 600 000 », a illustré Francisco Sanchez, président de CNS Global et ancien sous-secrétaire au Commerce international des États-Unis.

UN PAYS OUVERT AU COMMERCE

Le Canada est un pays ouvert au commerce, mais seulement 4 % de ses entreprises, soit 45 000 environ, sont engagées dans des activités commerciales internationales.

Ce nombre paraît peu élevé mais, toutes proportions gardées, c'est quatre fois plus qu'aux États-Unis où les entreprises peuvent davantage compter sur la profondeur du marché intérieur américain.

En fait, les Américains, hormis les gens d'affaires et les chercheurs, sont plutôt réfractaires à l'internationalisation des échanges commerciaux, même si Washington est engagé dans des négociations de traité avec l'Union européenne et des pays du Pacifique.

« En 2100, on ne parlera plus du développement de la Chine, mais plutôt des États-Unis qui seront devenus par rapport à elle ce qu'était le Royaume-Uni par rapport aux États-Unis à la fin du XIXe siècle », dit David Cote, PDG de Honeywell, équipementier diversifié comptant 130 000 employés et présent dans une centaine de pays.

M. Cote préconise le développement des affaires avec la Chine qui lance des défis de compétitivité aux sociétés occidentales. Celles-ci doivent stimuler l'enseignement des sciences et des techniques afin de pouvoir les relever.

NOUVELLES ROUTES COMMERCIALES

De nouvelles routes du commerce mondial s'ouvrent, à commencer par celles de l'Arctique où on retrouve des joueurs dont on ne soupçonnait même pas l'intérêt pour la région. « Il y a trois ans, un envoyé de Singapour est venu à Reykjavik », a raconté Olafur Ragnar Grimsson, président de la République d'Islande. Cet été, Singapour est l'hôte d'une conférence mondiale sur la route de l'Arctique.

« Beaucoup d'acteurs se positionnent dans les nouvelles chaînes d'approvisionnement qui émergent », a-t-il résumé.

La cité-État a trouvé sa place dans les chaînes de valeur grâce à ses logiciels, un lubrifiant essentiel de la mondialisation.

S'INTÉGRER À LA CHAÎNE

Outre les technologies de l'information, la conteneurisation du transport des marchandises en a réduit les coûts et facilité les possibilités. L'État du Maine aspire ainsi à devenir la porte d'entrée et de sortie américaine de l'Arctique.

Dans cette nouvelle donne mondiale, il faut reconnaître que le Canada pèse 2 % du commerce mondial, même si les Canadiens ne représentent que 0,5 % de la population.

Il compte peu de leaders mondiaux pour intégrer des PME canadiennes à leurs chaînes de valeur.

Faire partie d'une pareille chaîne représente souvent un défi de taille pour l'entrepreneur, habitué à fabriquer un produit fini, qui connaît tous ses fournisseurs et tous ses clients. Il lui faut non seulement des contacts, mais aussi des notions avancées de littératie économique et financière.

C'est dans ce contexte que le Centre interuniversitaire de recherche en analyse des organisations (CIRANO) a lancé hier un site interactif de données économiques internationales.

Moyennant un abonnement, Mondo.cirano.qc.ca fournit des données sur 89 pays et 61 industries portant sur les années 2007 à 2015. Le moteur de recherche dispose de 1500 variables pour organiser plus de 1 million de données.

Ce n'est pas la panacée, mais c'est un outil de plus pour occuper une place dans un monde qui se transforme et nous transforme à une vitesse qu'on peine à imaginer.