Le marché immobilier du Portugal continue à susciter les convoitises des acheteurs étrangers, même si les visas «gold», dispositif phare mis à mal par un scandale de corruption, ont perdu de leur éclat.

Plus d'un logement sur cinq a été vendu à des étrangers en 2014, soit 23 000 maisons et appartements, en premier lieu aux Britanniques, suivis des Chinois et Français, selon un bilan provisoire fourni à l'AFP par l'Association des agents immobiliers du Portugal.

«La progression du marché immobilier a atteint entre 9 et 15% en 2014. S'il n'y avait pas eu la débâcle de Banco Espirito Santo et l'affaire des visas 'gold', on aurait atteint 25%», estime son président Luis Lima.

Douceur du climat, niveau de vie moins cher, prix immobiliers au plus bas et l'exonération fiscale accordée depuis 2013 aux retraités européens sur leurs pensions ont été autant d'arguments pour s'exiler ou investir au Portugal.

«On assiste à une petite baisse de la demande des Chinois depuis le scandale des visas en novembre, mais le nombre de Français qui s'installent au Portugal explose», commente Miguel Poisson, directeur général du réseau immobilier ERA au Portugal.

Le Portugal a détrôné le Maroc comme point de chute préféré des retraités français. Parmi les 3680 Français à y avoir acquis un bien immobilier l'an dernier figure Serge Pasquier, 75 ans, ancien chef d'entreprise marié à une Portugaise.

«J'ai vendu mon commerce de meubles et mon logement de 90m2 à Saint-Mandé près de Paris pour m'acheter un appartement de 300 m2 avec vue sur mer près de Lisbonne, à un prix nettement inférieur», explique-t-il.

«Le climat est très agréable, la vie est nettement moins chère et on se sent en sécurité. Je n'ai pas regretté mon choix», dit-il avec un large sourire.

Les prix ont chuté de 30% depuis la crise en 2010, une aubaine dont profitent autant les retraités européens que les investisseurs chinois ou brésiliens.

La tendance a cependant commencé à s'inverser, car la frénésie des acheteurs étrangers «a contribué à faire remonter les prix des appartements de qualité à Lisbonne et en Algarve», explique Pascal Gonçalves, président de l'agence Maison au Portugal.

Villas au bord de la mer

À l'instar des Français, les Chinois raffolent de maisons avec piscine à Cascais, station balnéaire cossue près de Lisbonne, et de villas au bord de la mer dans le sud du Portugal.

Mais les goûts divergent quand il s'agit de choisir un appartement dans la capitale portugaise: si les Français optent pour de l'ancien rénové, de préférence avec vue sur le Tage, les Chinois jettent leur dévolu sur des logements ultramodernes.

Depuis fin 2012, le Portugal offre aux candidats hors l'Union européenne prêts à débourser 500 000 euros pour un logement un visa «gold», sésame qui leur ouvre les portes de l'Europe.

Pour y avoir droit, on peut aussi investir un million d'euros ou créer dix emplois. Jusqu'à fin 2014, au total 2022 permis de séjour, soit un investissement de 1,2 milliard d'euros, ont été accordés.

Ces visas pour étrangers fortunés ont cependant pris un sérieux coup après l'arrestation en novembre de onze personnes, dont de hauts fonctionnaires, dans une enquête pour corruption et blanchiment d'argent.

Le réseau est soupçonné d'avoir gonflé artificiellement les prix de certains biens immobiliers pour atteindre les seuils requis. Plusieurs acheteurs chinois se sont plaints, estimant avoir été dupés.

«Quand il y a beaucoup d'argent en jeu, la tentation de s'enrichir est très grande. Il faut renforcer les contrôles», a commenté Domingos Amaral, professeur d'économie à l'Université catholique portugaise.

Mais l'affaire ne devrait selon lui pas freiner durablement les investissements immobiliers, un avis partagé par les professionnels du secteur.

Selon Luis Lima, «le scandale des visas a certes ralenti la reprise du marché et pesé sur la confiance des investisseurs, mais l'immobilier devrait continuer à dynamiser l'économie du Portugal en 2015».